« L’homme est un animal à mousquet »
(Anatole France)
Par Renos Dossous
Trois incidents confrontés par un même citoyen remettent clairement
en question le professionnalisme des agents de douane du Canada. Le premier
s’est déroulé à Lacolle sur la frontière États-Unis - Québec, le deuxième à
l’aéroport Pearson de Toronto et le plus récent, à l’aéroport international
d’Ottawa.
Dans le premier cas, une agente de la douane (oui, une
femme), allant au delà de l’autorité que lui confère son poste, intercepte de
façon abrupte un voyageur pour vérifier son équipage. Si la vérification en soi
n’est pas dénuée de légitimité, le geste était grossier et injustifié. Mais le voyageur en question n’ayant rien à
cacher, suivit les consignes, répondit aux questions, même aux plus insidieuses.
Il n’a pu s’empêcher cependant de s’enquérir des raisons de ce traitement spécial
dont lui seul faisait l’objet. « Ces
raisons, vous les connaissez parfaitement, Monsieur », lui répondit-on. Et
aujourd’hui encore, il attend de les découvrir. Après deux ou trois appels téléphoniques
agrémentés de tout le dramatisme d’un mauvais roman, l’agente en question lui
permit de regagner le car de Greyhound qui a du attendre toute la durée de
cette opération ubuesque. C’était en 2010.
Le deuxième incident arriva à l’aéroport Pearson de Toronto,
en janvier 2013. Cette fois-là, le même citoyen, revenant du Mexique, entre
dans la section réservée à la douane. Plusieurs autres voyageurs circulent
devant et derrière lui. Distrait, il ne se rend même pas compte de la position
exacte de l’agent qui devait s’occuper de lui car il y en avait plusieurs.
Tandis qu’il se dirige vers une agente disponible, assise en face de lui, un
autre placé latéralement le retient vigoureusement par le bras gauche. Exactement
comme il ferait pour un délinquant qui risquerait de s’enfuir. Il happe le
passeport de la main du client, en retire le formulaire et le rend à son
propriétaire. Malgré la surprise provoquée par cette agression du personnage en
uniforme, le voyageur se montra prudent et réservé. Tournant le dos à cet agent,
il s’adressa enfin à la collègue de ce
dernier. « Pourriez-vous m’indiquer, Madame, l’espace réservé aux
correspondances? Je vais à Ottawa. » Cette belle dame voulant sans doute
se montrer solidaire de son collègue dans l’indécence, jeta un regard de dédain sur le client tout en
lui offrant une réponse qui ne saurait être plus révélatrice. « Ne
savez-vous pas lire, Monsieur? Vous n’avez qu’à prendre le couloir de gauche ».
C’est à se demander si cette dame très élégante dans son uniforme aura le temps
d’apprendre un jour que la solidarité dans le délit ou le crime n’est pas une
vertu?
Le troisième incident dériva de la carence totale d’éducation
d’une autre agente. Cette fois, à l’aéroport d’Ottawa. Mardi 26 mars 2013, onze
heures du soir. Notre voyageur, le même, arrive de la République dominicaine
(Sunwing). Il pénètre dans l’aire de la douane. La douane, décidément! Tout
s’était très bien passé jusqu’au moment de rendre le fameux questionnaire
destiné aux vérifications de cette institution. Une autre dame, toute raide dans son
camouflage, pour ainsi dire, entourée pourtant d’une demi-douzaine de collègues
masculins bien musclés, arracha littéralement le passeport des mains de l’intéressé
pour en sortir le document qui justifie son travail. Une fois terminé, elle le lui
rendit et observait déjà de l’autre côté. Comme si son geste était le plus
normal du monde.
Un passager qui se respecte et
respecte la loi, qu’il soit noir, latino, autochtone ou autre, jusqu’à preuve
du contraire, a le droit de s’estimer au dessus de tout soupçon. Dans le cas
qui nous concerne, la seule différence entre notre voyageur et les autres, c’est
que précisément il est noir. Et comme il n’existe aucun concept d’être humain
dont un des groupes susmentionnés soit exclu, notre voyageur s’interroge
encore. En tout cas, une seule chose ne laisse pas de doute dans son esprit. Un
employé possède tous les droits du monde de ne pas aimer son travail. Et
personne ne peut lui ôter la liberté de se recycler, de changer. Mais quand on
est payé pour accomplir une tache, ne pas le faire ou le faire mal, quand on
peut faire mieux, c’est frauder à la fois l’État et les citoyens. Pour le
fonctionnement équilibré de notre société, espérons avec ferveur que l’Agence
des services frontaliers du Canada qui embauche les individus qui la représentent
auprès du public, des clients à qui ces agents doivent leur salaire, se montrera
plus sélectif. Tout le monde n’a pas la faculté de comprendre la logique de
cette cooccurrence inéluctable à savoir que tout comme il n’y a pas de
professeur sans étudiant, il n’y a pas d’agent de douane sans client.
Nota.
Une protestation
formelle (de l’intéressé) – liée au cas de Toronto - a été adressée à ce sujet à
l’Agence des services frontaliers du Canada dont la réaction se fait encore
attendre.
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