Nombre total de pages vues

samedi 1 octobre 2011

Le prix de la gratuité de l'éducation...

A partir du lundi 3 octobre, 142 000 enfants de 6 à 12 ans qui n'ont jamais été à l'école, issus de huit départements du pays, vont finalement débuter leur scolarisation, a rassuré ce jeudi au Nouvelliste Georges Gaston Mérisier, conseiller en éducation du président de la République. Pas de nouvelles constructions d'écoles, encore moins des ajouts de salles de classe. M. Mérisier a expliqué que 80% de ces enfants sont inscrits dans des écoles publiques qui vont fonctionner en double vacation. Par ailleurs, il a rappelé que l'Etat annule cette année les frais scolaires réclamés dans les écoles nationales à travers le pays...
Haïti: A écouter le chef de l'Etat ou son conseiller en éducation, Georges Gaston Mérisier, à partir du lundi 3 octobre, date de la réouverture des classes, on ne verra plus d'enfants de 6 à 12 ans errer dans les rues des départements du Sud, du Sud-Est, des Nippes, de la Grand'Anse, du Centre, du Nord, du Nord-est et du Nord-Ouest, sans aller à l'école. Car tous les enfants qui n'ont jamais été à l'école ou qui ont fait leur première ou deuxième année sans pouvoir terminer, ont été répertoriés et inscrits dans une école.
« Depuis environ deux mois, le ministère de l'Education nationale a mobilisé toutes ses structures, que ce soient les cadres au niveau central ou les directions départementales. Nous avons été chercher ces enfants partout, que ce soit dans les sections communales pour les inscrire à une école », a indiqué ce jeudi Georges Mérisier au Nouvelliste.
« Non seulement nous avons été chercher ces enfants sans distinction, mais aussi, nous prenons aujourd'hui le soin de n'oublier aucun d'entre eux », ajoute-t-il, soulignant que ces enfants ont été répertoriés à partir d'une méthode de porte à porte.
80% de ces enfants, poursuit le conseiller du chef de l'Etat, ont été inscrits dans les écoles publiques des départements concernés et les 20% restants dans des écoles communautaires, presbytérales et missionnaires.
« Un accord va être signé avec les responsables de ces écoles et l'Etat paiera pour les 20% de ces enfants », a expliqué le conseiller, soulignant que la subvention des matériels scolaires octroyée depuis quelques années aux parents continue.
Des écoles dans les sections communales !
En ce qui a trait aux enfants issus des sections communales reculées qui parcourent plusieurs kilomètres à pied pour se rendre à l'école, Georges Mérisier a aussi annoncé la couleur à travers le programme d'Education gratuite. « Dans les sections communales dépourvues d'écoles, les enfants vont suivre leurs cours dans des espaces temporaires en attendant la construction des bâtiments au cours de l'année scolaire. Nous avons déjà panifié la construction de ces écoles », a confié celui qui est pressenti par le président pour être ministre de l'Education.
« Nous voulons faire en sorte que l'enfant ne parcoure pas une longue distance pour aller à l'école. Nous privilégions la proximité », a ajouté Georges Gaston Mérisier.
Quelle pédagogie appliquée ?
On n'a pas encore d'informations sur le nombre d'enfants qui seront repartis par salle de classe, encore moins le niveau des enseignants recrutés pour ce programme; toutefois le conseiller du président a assuré que les enfants, selon leur âge, seront divisés en trois groupes, soit en trois classes.
« Nous avons un groupe de 6 à 7ans, c'est une première classe. Ce sont des enfants qui ont l'âge normal d'aller à l'école. Ils vont passer six ans avant de boucler leur fin d'études primaires », explique Georges Mérisier.
Il y a un groupe de 8 à 9 ans qui forme une deuxième classe, poursuit-il. « Nous avons élaboré un programme spécial pour ces enfants. Au lieu de passer six ans avant de boucler la sixième année, ils vont le faire en quatre ans », fait remarquer Mérisier.
Dans le dernier groupe se trouvent les enfants de 10 à 12 ans pour lesquels nous avons également développé un programme accéléré de trois ans. Ce groupe aura à subir les examens de certificat d'études primaires après trois ans. Reste à expérimenter l'efficacité d'un tel programme et le nombre d'heures qui sera consacré à cet effet. Faire en trois ans ce que l'on n'arrive pas souvent à faire en six ans est plus qu'un défi, et la qualité de l'éducation devrait être aussi remise en question.
L'Ouest et l'Artibonite pour l'année prochaine
Les départements de l'Ouest et de l'Artibonite ne sont pas concernés cette année par le programme d'éducation gratuite. L'Artibonite n'est pas concerné cette année, a souligné le conseiller du président, du fait que c'est le département ayant bénéficié beaucoup plus du programme baptisé « Education pour Tous » du ministère de l'Education nationale.
« Il y a une raison objective qui a fait renvoyer à l'année prochaine le programme d'éducation gratuite dans l'Ouest. Beaucoup de familles vivent encore dans les camps avec les enfants. Or, le gouvernement prévoit de les reloger. Il sera donc difficile de retracer ces enfants », a expliqué Georges Gaston Mérisier.
« Pour l'Ouest et l'Artibonite, l'Etat a pris des dispositions pour rendre gratuite la scolarisation de tous les enfants inscrits dans une école privée en première année fondamentale, toujours dans la logique de la gratuité de la scolarisation », a-t-il confié. 120 00 enfants, prévoit-il, vont en bénéficier.
Annulation des frais scolaires dans les écoles publiques
A en croire le conseiller en éducation du chef de l'Etat, les frais scolaires (100 à 200 gourdes) habituellement réclamés dans les écoles nationales, de la 1ere à la 6e année fondamentale, ont été annulées cette année à l'échelle du pays. Les parents n'ont pas à verser un sou à ces écoles.
« Le pouvoir central va octroyer une allocation budgétaire par enfant à ces écoles pour leur fonctionnement », a indiqué Georges Mérisier.
« Notre objectif, c'est de ne plus voir d'enfants en âge scolaire vagabonder dans les rues. Nous avons mis des structures en place à cet effet, maintenant il reste à vérifier si tout marche bien », a fait savoir le conseiller du président. Tout le monde est mobilisé, dit-il, pour s'assurer que tous les enfants de 6 à 12 ans - qui doivent être à l'école - sont à l'école.
Il suffira de confronter les discours avec les faits!


Valéry DAUDIER
vdaudier@lenouvelliste.com
http://www.lenouvelliste.com/article.php?PubID=1&ArticleID=97750&PubDate=2011-09-29

Commentaire
Démagogie, démagogie et un petit peu plus de démagogie et les gens finiront par croire ce qu'on leur sert trop souvent! Le futur (?) ministre de l’éducation ne peut que justifier le choix que le président a fait de sa personne. Il n'y a là rien de reprochable. Cependant un petit regard critique sur ce qui se passe nous dit que quelque chose va mal, très mal. Traditionnellement en Haiti, ceux qui envoient leurs enfants à l’école, ce ne sont pas exclusivement les nantis. C'est une pratique connue de tous, et qui consiste pour les familles, surtout des femmes seules, à tout mettre de côté tout au long de l’année pour penser à l'ouverture de septembre1. La chose est si généralement admise que plusieurs d'entre elles, les paysannes surtout, achetaient des animaux (notamment des porcs)qu'ils passaient l’année à engraisser pour la vente dont ils devaient tirer les frais scolaires de leurs enfants. D'où le dicton haïtien qui veut que les porcs sont2 les tirelires des pauvres. Maintenant que la situation s'est considérablement détériorée, que les porcs ont été décimées au nom d'une catégorie importée et plus chère (au nom de l’intérêt personnel de Dieu sait qui), le tremblement de terre (et toutes les autres crises...) n'a fait que donner le coup de grâce à l'espoir de ces familles de pouvoir continuer à rêver d'un avenir pour leurs enfants. Est-ce que en accumulant ces enfants sur un terrain vague, en les arrachant du sein de leurs foyers sans pour autant offrir à ces mêmes familles une alternative, un emploi, un moyen de subsistance qui va au delà de l’aumône circonstanciel, on fait vraiment quelque chose? Est-ce que celui qui va à l’école ne mange pas? Est-ce qu'il n'a pas besoin d’électricité (de plus en plus rare en Haiti) pour étudier? Est-ce qu'une fois rentré chez lui, il va trouver une maisonnette décente, munie d'eau potable, des parents tranquilles, pour s'asseoir tranquillement lui aussi et étudier? Est-ce que l'environnement scolaire est adapté à ce qu'on attend de lui? D'abord, est-ce qu'il y a des écoles construites pour recevoir ce flot d'enfants qui vont faire leur première expérience à l’école? Quand est-ce que les maîtres, les instituteurs dont on sait qu'ils deviennent de plus en plus rares pour de nombreuses raisons en Haiti, ont été (secrètement?) formés pour, le cas échéant, assumer leur fonction? Est-ce que le certificat d’étude primaire qui exigeait 6 ans et se faisait dans des conditions extrêmement difficiles, pourra très efficacement se faire maintenant, à l’ère de l'informatique, en seulement 4 ans, voire 3? C'est possible pourraient rétorquer certains défenseurs de ce nouveau système précisément parce qu'on a les sciences informatiques. Mais alors où se trouvent ces laboratoires, ces moyens modernes qui existent certes, mais auxquels la majorité des enfants haïtiens n'ont pas accès? La bonne volonté est peut-être là, mais un minimum de réalisme nous aurait peut-être inspiré une toute autre démarche. La création d'emploi pour les familles, la reconstruction de ces maisons (détruites, inondées, lézardées avant et depuis le séisme) qui doivent les loger, l’amélioration de la distribution d'eau potable, de l’énergie électrique, la re-dynamisation du tourisme, la forte priorité à accorder à l'agriculture (pour un minimum d’indépendance alimentaire) semblent pourtant les vrais premiers pas dans la direction d'une amélioration globale de la situation éducative du pays. Que ces conditions que nous critiquons maintenant aient longtemps existé, surtout depuis l986-1987, et que plusieurs aient pu faire des études quand même, c'est un fait. Mais le monde change. Et un pauvre en Haiti en 1986 n'ayant rien eu de meilleur dans sa vie entre-temps, est mille fois plus pauvre maintenant. Et ce, parce que le monde avance malgré notre stagnation. Alors pourquoi ne pas commencer à penser plus rationnellement à l’éducation en Haiti?


1. Et nous parlons de gens qui, dans la plupart des cas, ne savent pas lire ni écrire eux-mêmes.
2(ont ete, car on les a éliminés sous pretexte de prevenir on ne sait quelle maladie, mais sans donner d'alternative à ces familles)

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire