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vendredi 5 août 2011

L’ombre de la corruption plane sur le Parlement haïtien

L’ombre de la corruption plane sur le Parlement haïtien. C’est ce que révèle un rapport publié le RNDDH. Selon ce rapport, des députés ont encaissé, en tant que contractuels, de fortes sommes d’argent pour lesquelles aucun service n’a été rendu. Ces élus locaux auraient, en total, reçu 2 140 250 millions de gourdes de Paul Antoine Bien-Aimé, l’actuel ministre de l’Intérieur. Une histoire qui ternit l’image du pays à l’extérieur et qui constitue un frein au développement socioéconomique du pays.
04/08/2011
Dans un rapport daté du mois de juillet 2011, le Réseau national de défense des droits humains (RNDDH) a fait savoir que la corruption, une entrave au jeu démocratique et au développement économique du pays, est la toile de fond de l’administration publique. Selon le RNDDH, elle s’est érigée en système au point qu’Haïti a intégré le cercle des pays les plus corrompus de la planète. Le RNDDH poursuit pour dire que l’administration publique haïtienne est caractérisée par le gaspillage, le copinage, le courtage et les détournements de fonds.
Les révélations du RNDDH se fondent sur des faits enregistrés au sein du ministère de l’Intérieur, symbole, selon lui, de cette du phénomène de la corruption, plus particulièrement sous l’administration de Paul Antoine Bien-Aimé. En effet, parmi les 105 contractuels travaillant à ce ministère, 22 sont d’anciens députés, dont 12 du bloc parlementaires nommé Concertation des parlementaires progressistes (CPP) et réélus sous la bannière de la plateforme présidentielle Inite. Ces 22 députés ont, entre autres, bénéficié d’un contrat qui leur a permis de percevoir des salaires mensuels allant jusqu’à 100 000 gourdes. Au total, 2 140 250 gourdes ont été décaissées au profit de ces parlementaires, ce qui, selon le RNDDH, est contraire à l’article 129.1 de la Constitution haïtienne qui stipule que « la fonction de membre du corps législatif est incompatible avec toute fonction rétribuée par l’État, sauf celle d’enseignant ».
Ce n’est pas pour la première fois que des membres du Parlement haïtien sont impliqués dans ces types de scandales. On se rappelle qu’au cours du mois de février 2007, le sénateur du Sud, Jean Gabriel Fortuné, avait fait des révélations sur les ondes de Radio métropole sur certains parlementaires qui auraient été mêlés au trafic de la drogue, à la vente de visas américains ou encore à des transactions suspectes avec la Socabank. De plus, on n’est pas près d’oublier non plus la fameuse affaire de l’ONA qui avait conduit M. Sandro Joseph en prison. Dans cette affaire, les noms de quatre puissants sénateurs ont été cités dans des prêts hypothécaires pas très clairs. Une situation qui vient renforcer les résultats de l’enquête sur la corruption réalisée en 2006 par le Bureau de recherche en informatique et en développement économique et social (Brides) avec l’appui de l’Institut de la Banque mondiale, mais aussi le fameux classement de la Fondation Héritage positionnant Haïti parmi les nations les plus corrompues du monde. Les resultats de cette enquête ont fait ressortir que 70, 1 % des ménages estiment que le gouvernement encourageait la corruption tandis que 84, 0 % des interviewés croient que le système judiciaire est manipulé par le gouvernement et par les intérêts économiques. Dans le cadre de cette même enquête, 52 % des ménages, 33 0% des entreprises privées avaient classé le ministère de l’Intérieur parmi les institutions les plus corrompues du pays, alors que 58 % des entreprises privées avaient classé le Parlement parmi les institutions les plus corrompues.
Ce triste décor témoigne de l’absence de volonté de la part de ceux qui devraient combattre la corruption mais qui choisissent plutôt de la soutenir. C’est en quelque sorte une prolongation de la politique de nos devanciers, qui consiste à s’enrichir via l’administration publique. En fait, des fonds qui devraient être utilisés pour changer le paysage apocalyptique du pays ou améliorer les conditions de travail des agents de la fonction publique sont dilapidés à des fins privées.
Ce cas en est un parmi tant d’autres offerts à l’administration de Martelly pour concrétiser ses promesses de campagne de rompre avec l’ancien système caractérisé par la corruption et de mettre en œuvre une nouvelle dynamique basée sur la bonne gouvernance économique. Le président Martelly, en tant que garant des institutions, dispose d’une série de lois, de décrets, de conventions internationales et d’institutions pouvant l’aider à accomplir cette lourde tâche. En effet, dans ses articles 238 à 243, la Constitution haïtienne fixe les obligations auxquelles sont tenus les fonctionnaires publics dans l’exercice de leurs fonctions. De plus, le Code pénal haïtien, dans ses articles 137 à 144, énumère une multitude de mesures à adopter en cas de corruption dans la fonction publique. Enfin, Haïti a ratifié la convention interaméricaine contre la corruption et celle des Nations unies, respectivement en juin 2004 et en juin 2007.
Pourquoi ne pas utiliser ces outils légaux contre les corrompus ?
Pour une fois, le peuple haïtien assistera-t-il à la condamnation de ceux qui sont censés intercéder en sa faveur mais qui détournent des fonds publics qui devraient être destinés à l’amélioration de ses conditions de vie ? Le président Martelly posera-t-il les jalons d’une stratégie impartiale de lutte contre la corruption afin de mettre un terme à cette perception négative des institutions publiques ? En tant qu’obstacle au développement socioéconomique du pays, la corruption est un agent dévastateur qui nuit à l’établissement d’un État de droit, mine la confiance des citoyens dans les institutions publiques et envoie une image négative du pays aux éventuels investisseurs.

Pierre Ricardo Placide
ppricardo1983@yahoo.fr
http://www.lematinhaiti.com/contenu.php?idtexte=25021&idtypetexte=

Commentaire
Si la démocratie consiste à choisir le moindre mal, rien n’étant parfait, sans prétendre prescrire quoi que ce soit à qui que ce soit, on peut dire qu'un pays pauvre classé parmi les plus corrompus de la planète perdrait moins avec un gouvernement fort, prêt à leur briser les reins aux groupuscules corrompus, qu'en se fermant les yeux sous prétexte qu'il faut respecter même les corrompus. Cette dernière position-là vaut pour ceux dont tous les problèmes sont déjà résolus. Il semble, compte tenu des calvaires économiques imposés jusqu'ici aux moins nantis, que la seule alternative raisonnable, c'est de freiner les délinquants cravatés. Quand le peuple souffre, sa voix, ses cris de désespoir, prennent une force aux accents dramatiques. Ne pas l’écouter, c'est le trahir. La peur bleue suscitée par le choix éventuel de Bernard Gousse, augurait quelque chose comme une révision des pratiques frauduleuses, du moins, c'est notre sentiment. La rage avec laquelle on a rejeté ce choix est symptomatique de quelque chose. C'était l'occasion rêvée pour Martelly de faire la différence ou d'échouer, de faire échouer le pays. Maintenant qu'il doit tout recommencer, qu'il fasse attention à réaliser un autre choix tout aussi (apparemment) judicieux. La résistance même de ses adversaires dira jusqu'où ils dédaignent le changement, surtout quand on passe de l’état d'anarchie (qui favorise la corruption)à un minimum d'ordre propice au progrès du plus grand nombre, notamment aux investissements dont ce pays a tant besoin. Faut-il être un partisan de Martelly pour comprendre jusqu’à quel point la peur qui étreint par les tripes ses adversaires, le favorise sur le plan moral? Il n'a pratiquement rien a faire pour cela. c'est un capital sur lequel il peut construire un édifice solide. S'il pouvait en profiter pour replacer ce pays sur les rails où on ne l'a jamais vraiment engagé pour connaitre le développement, il surprendrait même ceux qui ne sont pas de son bord et écrirait une belle page d'histoire! Antonio Guzman Fernandez (1978-1982), le paysan, a réalisé cet exploit en République Dominicaine à côté de nous.

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