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samedi 20 août 2011

Sortons de notre boue !

L’international nous regarde. Nos hésitations, nos erreurs et nos querelles agacent. Trois mois après l’investiture de Michel Joseph Martelly le pays stagne. Le Washington Post frappe. Quelle réponse donnera-t-on ?
19/08/2011
« Haïti encore dans la boue ». Voilà comment le Washington Post dépeint la situation dans laquelle patauge le pays depuis plus de trois mois. Nous marquons des pas sur place. Nous nous enlisons dans une triste crise politique, injustifiée et évitable, dont le seul mérite est d’accélérer la dégradation des conditions socioéconomiques des Haïtiens, notamment des plus pauvres.
Le changement promis n’atterrit toujours pas. Et même, il s’éclipse dans l’ombre d’une continuité imposante. Trop imposante. Michel Joseph Martelly s’enorgueillit pourtant de vendre les valeurs positives d’Haïti au cours de ses nombreux et mystérieux voyages à l’étranger et exhorte la presse haïtienne à faire de même. Sinon, taisez-vous ! a-t-il ordonné. Malgré tout, nous ne sommes pas tout beaux aux yeux de l’international, monsieur le Président. Il y a du travail à faire. Beaucoup de travail pour redorer notre blason. Et cela demande non pas des mots, mais des actions concrètes qui vont dans le sens d’une relance systématique du pays sur le plan économique, politique et social.
Tout un peuple attend encore que le succès électoral individuel du président Martelly se transforme en succès collectif. Est-on en train de rêver ? Le succès collectif exige des sacrifices et la mise à l’écart des ego. En effet, après vingt-cinq ans de tâtonnement, d’approximation et de dérapages politiques divers, l’heure est venue de ressouder les différentes couches du pays pour affronter les multiples défis qui se dressent devant notre nation au début de ce nouveau millénaire. L’union fait la force. N’est-ce pas le fondement de notre identité de peuple et le sens de notre liberté ?
État des lieux…
Trois mois après son investiture, Michel Martelly marche dangereusement vers l’échec. Après le rejet successif de Daniel Rouzier et de Bernard Gousse, le chef de l’État est dos au mur et semble jouer la carte du temps pour contourner les critiques. Cependant, avec l’absence d’un gouvernement, l’aide et les investissements internationaux se font de plus en plus rares. Pour un pays dont le budget dépend à plus de 60 % de l’international, cette situation n’est pas sans conséquence pour les plus démunis. À ce rythme, les grandes promesses de campagne et les grandes priorités de Martelly (relogement des centaines de milliers de victimes du séisme, relance de l’économie et éducation pour tous) ne verront probablement jamais le jour.
Dans cette partie d’échecs entre l’exécutif et le Parlement, qui met en péril l’existence même de la nation haïtienne, aucun des protagonistes n’est innocent. La responsabilité est partagée entre le président de la République et les parlementaires du GPR qui, petit à petit, sont en train de s’ériger en véritable force d’opposition. Cependant, il revient au chef de l’État de lancer la réconciliation afin d’établir un pacte de gouvernance représentatif de la volonté populaire qui l’a placé aux commandes du pays, tout en tenant compte des recommandations des secteurs organisés du corps social. Divorcer d’avec le « sétoupamisme » et constituer un gouvernement d’ouverture qui travaillera dans l’intérêt de la communauté, voilà le rêve à vendre, ou du moins la réalité pour laquelle doit œuvrer monsieur le Président. Pour cela, des sacrifices s’imposent. Le chef de l’État, comme le soutient le Washington Post, doit se libérer de l’influence de son cercle d’amis et élargir son groupe de « conseillers ».
Tout comme la communauté internationale, le peuple haïtien est fatigué de la politique mesquine qui se pratique au sommet de l’État. Les signaux que nous envoyons aujourd’hui sont plus que négatifs. La presse haïtienne n’est en rien responsable de ce triste feuilleton. Le temps est donc venu d’effacer cette image de pays à la dérive, politiquement grincheux et dépendant.
L’inacceptable ne peut être la règle, ni l’échec une constante des chefs d’État haïtiens. L’espoir de réussite est encore là. Aussi mince qu’il puisse être. Haïti ne peut attendre trois mois de plus sans Premier ministre. Alors au diable les rancœurs idéologiques et les coups bas ! Nous avons une nation à sauver. Sortons de notre boue !

Lionel Edouard
doulion29@yahoo.fr
http://www.lematinhaiti.com/contenu.php?idtexte=25281&idtypetexte=

Commentaire
Je vois déjà plus d'un patriotard, se plaignant contre un tel titre. Comme si celui qui l'utilise avait recours À une image inappropriée pour qualifier une situation autre que celle qui existe réellement. La vérité est que ce journaliste a vu juste. Dans le sens le plus littéral du terme, les villes les plus importantes de ce pays, en commençant par la capitale, se trouvent à patauger dans la boue. Moralement (dans la double dimension éthique et psychologique du terme) le pays se trouve au point le plus bas. On n'a qu'à lire sur le visage des citoyens qui circulent dans ces rues poussiéreuses et nauséabondes pour comprendre jusqu'à quel point la politique mal appliquée peut détruire, ravager, anéantir non point seulement un territoire, mais plusieurs génération. Ces politiciens n'ayant rien à offrir car les vrais politiciens, les professionnels ayant déserté, il ne reste que les autres, ceux qui sont là parce qu'ils ne savent rien faire d'autre. Ce sont ceux qui font accroire que politiser, c'est improviser. Et ce sont eux aussi, les meurtriers de millions d'hommes, de femmes et d'enfants. Leur vie étant un échec total, ils ont juré de ne laisser de chance à personne. Ce n'est pas inutilement que de tels échantillons sont prêts à donner leur vie pour barrer la route aux politiciens vrais, aux plus capables, aux mieux qualifiés. Leur avenir dépend de la somme d'argent qu'ils auront accumulée quand tout était perdu pour eux, quand ils n'avaient aucun autre espoir.
La politique est leur moyen de réhabilitation. C'est la différence avec ceux qui en ont la vocation et la plupart du temps la qualification pour l'exercer. Pauvre Haiti!

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