Une étrange cathédrale dans la graisse des ténèbres
Annoncé depuis quelques mois, le film de Charles Najman, inspiré du séisme du 12 janvier 2010, est à l’écran. Pour sa grande première à Le Vilatte, l’acteur principal Frankétienne a été chaudement applaudi.
24/06/2011
Plusieurs dizaines de personnes ont assisté, mercredi, à Le Vilatte, au long métrage de Charles Najman, « Une étrange cathédrale dans la graisse des ténèbres ». Le grand poète et dramaturge haitien, Frankétienne, est l’acteur principal de ce film tourné durant 22 jours sur les ruines de la Cathédrale de Port-au-Prince.
« Une étrange cathédrale dans la graisse des ténèbres » évoque le séisme du 12 janvier 2010 qui a ravagé la zone métropolitaine. Ce désastre , annoncé par Frankétienne dans sa pièce « Melovivi » ou Le piège, a provoqué la mort d’environ 200.000 personnes. « C’aurait été mieux de compter ces victimes dans le cadre d’une grande révolution politique et sociale qui aurait pu enfanter une nouvelle Haiti », a lâché le poète, regrettant que cette montagne de cadavres ait été enregistrée pour rien.
Dans le film, Frankétienne ne cesse de s’interroger sur le mal chronique d’Haiti. Le poète se demande sans répit ce que les élites ont fait de ce pays indépendant depuis 1804. Les vains discours des politiciens assoiffés de pouvoir, les promesses non tenues, n’ont jamais diffusé la lumière dans la République ténébreuse. Un profond désespoir, inspiré au fond d’un grand sentiment de révolte et de frustration, marque le discours du poète. Les séquences, montrant les enfants de sept à douze ans qui s’amusent innocemment à l’intérieur de la Cathédrale en ruines, renvoient à l’image d’un pays insouciant de l’avenir de ses fils.
Haiti, c’est la terre dotée d’une grande richesse culturelle. Le peuple haitien est foncièrement religieux. Une catégorie, en quête d’une vie meilleure dans l’Eglise chrétienne, communique avec le Dieu suprême. Alors que le reste de la population espère, célèbre, chante, danse le vodou. Une séquence mettant en valeur le « Gede » montre à quel point l’Haïtien maîtrise sa relation avec le Dieu de l’univers dans ses multiples formes d’expressions.
Au-delà du désespoir, l’espoir renait. « Une étrange cathédrale dans la graisse des ténèbres » convie les Haïtiens à se ressaisir afin d’instaurer une meilleure organisation des espaces sociétal, politique, culturel et environnemental. Franketienne et Charles Najman, respectivement acteur principal et réalisateur, tous deux présents à Le Vilatte lors de la grande première du film en Haiti, n’ont pas voulu faire des déclarations suite à la projection du long métrage. Par contre, certains invités ont applaudi le documentaire qui se veut la radiographie d’une société en ruine. « C’est dramatique ! Cependant, il y a de l’espoir. Nous pouvons et nous devons changer Haiti », a déclaré l’historien Michel Hector en sortant de Le Vilatte. La Cathédrale en ruines fait penser à Haiti détruite qui doit renaitre de ses cendres.
Long métrage : Une étrange cathédrale dans la graisse des ténèbres
Autre titre : Franketienne, le poète au milieu des ruines
Pays Concerné : Haïti
Réalisateur : Charles Najman
Pays du réalisateur : France
Avec : Frankétienne
Production : Fondasyon Konesans Ak Libète (FOKAL), Huit Production (La)
Pays de production : France, Haïti
Distribution : Huit Distribution (La)
Durée : 78'
Genre : portrait
Type : documentaire
Hudler Joseph
josephudler@yahoo.fr
http://www.lematinhaiti.com/contenu.php?idtexte=24186
Commentaire
Oui, l'art! Et toujours l'art. C'est mieux que la religion puisqu'il est action. Attendre dans la passivité n'a jamais sauvé personne. Il ne manquera certainement pas de faux prophètes pour nous faire accroire que passivité égale patience. Comme si la patience signifiait insouciance, lâcheté, abandon et attente tranquille de la mort. "Tout homme doit mourir un jour, mais toutes les morts n'ont pas la meme signification" (Mao Tsé Toung)
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire