Haïti: La grande foire du livre qui se tient chaque année le jeudi de la fête Dieu se réinvente, a annoncé ce vendredi Frantz Duval membre du comité organisateur de l'événement.
En effet, la petite manifestation qui avait permis de vendre 400 exemplaires de quelques titres d'auteurs haïtiens en 1994 et organisé au fil des années de rares conférences, dix-sept ans plus tard, se donne de nouvelles ambitions.
Cette année,ce sont cent trente-cinq auteurs qui seront en signature contre quatre en 1994. L'invitée d'honneur, Edwidge Danticat, a connu un parcours atypique. Ovni du paysage littéraire haïtien, elle est la première haïtienne d'origine à avoir connu le succès en anglais aux Etats-Unis d'Amérique où elle avait émigré à 12 ans, avant d'être traduit en français en France avant d'être rééditée en Haïti. Enfin, grâce à des partenaires comme l'Institut Français, la Fondation Connaissance et Liberté, la Direction Nationale du Livre, l'Organisation Internationale de la Francophonie, l'Agence Universitaire de la Francophonie et d'autres, toute une série d'activités seront offertes gratuitement au public pendant quinze jours du 16 juin au 1er juillet.
« Avec autant d'auteurs en signature qui présentent près d'une centaine de nouveautés - certains comme Danticat signent cinq titres inédits, un ouvrage a une dizaine d'auteurs- c'est le record absolu pour Livres en folie. Il y aura de grandes pointures confirmées et des débutants comme cela est le principe de la foire qui accueille tout le monde laissant le public juge du talent et décideur du succès », insiste Duval.
« Le choix de l'invité d'Honneur est le signe du tournant que nous allons donner à Livres en folie pour les années à venir : ce ne sont plus seulement les livres en français ou en créole des auteurs haïtiens ou les livres sur Haïti qui sont les bienvenus, mais aussi tous les livres sur Haïti ou d'auteurs haïtiens quelque soit la langue de publication. Danticat est le parfait exemple que la langue n'est pas une barrière. Son oeuvre puise ses racines et son âme dans la profondeur de l'histoire et des moeurs haïtiennes. Cette année, nous ouvrons la porte à l'anglais mais dès, l'an prochain, ce sont toutes les langues qui seront les bienvenues », précise le rédacteur en chef du Nouvelliste impliqué depuis des années dans la redéfinition constante de cette foire inventée par Le Nouvelliste et la Unibank.
Preuve du tournant, Livres en folie offrira un lot d'une centaine d'ouvrages d'auteurs haïtiens ou de livres sur Haïti écrits en anglais à la bibliothèque de la Fokal qui organisera une exposition, ouverte au grand public, de titres produits dans cette langue.
« Il y a un grand intérêt pour Haïti à travers le monde. Il y a de nombreuses publications qui traitent d'Haïti qui demeurent inconnues des Haïtiens, il est temps que nous nous y intéressions. Les livres en anglais ne sont que la pointe de l'iceberg, il y a une mine d'ouvrages en espagnol disponible en République Dominicaine qui est inconnue des Haïtiens, il est temps de titiller la curiosité du lectorat pour ces terres inconnues du monde des livres où l'on parle de nous », pense Duval.
A côté des conférences, des débats et des lectures publiques, des habitudes prises depuis des années dans l'univers de Livres en folie, il y aura des représentations théâtrales de deux pièces, l'une, Ayiti, avec Daniel Marcelin acteur, mais surtout animateur du plus ancien et plus réputé des programmes culturels radiophoniques et l'autre avec la troupe Cosaf qui a adapté un roman de Gary Victor, Le diable dans un thé à la citronnelle.
Deux films seront aussi projetés pendant la quinzaine. Il s'agit de « BONDYE BON », un film d'Arnaud Robert et de Ian Jaquiet. Ce film vient d'obtenir le prix du documentaire "La relève via Le Monde" au Festival Vues d'Afrique, à Montréal. L'autre « Une étrange cathédrale dans la graisse des ténèbres », un film de Charles Najman, est une évocation du terrible séisme qui a ravagé la capitale le 12 janvier 2010, à travers la voix du plus grand poète haïtien vivant, Frankétienne, et de sa pièce prémonitoire « Le piège ». Tourné dans la grande cathédrale en ruines de Port-au-Prince, ce film est un chant de vie et de mort, une réponse poétique à la tragédie et au désespoir.
« Pourquoi des films et du théâtre ? se demande Duval qui avance comme explication : pour stimuler la réflexion, ouvrir des portes à l'imagination dans une ville qui s'enferme sur elle-même sans salle de spectacle ou de cinéma en activité à l'année longue. »
Comme l'an dernier, la photo sera encore au menu de Livres en folie avec deux expositions. « Haïti avant l'orage », à partir des oeuvres du photographe Olivier Beytout, sera sur les murs de l'Organisation Internationale de la Francophonie. Et une exposition, le jour même de Livres en folie, au Parc historique de la Canne à Sucre, à partir de photographies réunies par le talentueux photographe Frederick Dupoux qui a travaillé avec des jeunes de milieux défavorisés dans le cadre du projet Fotokombit, sera présentée au public.
Grande innovation de cette année qui trouve sa place dans la programmation de la Quinzaine du Livre, la formation, avec des ateliers autour des métiers du livre, sur l'écriture d'histoires pour enfants, la reliure, l'initiation aux métiers de l'édition et à la correction d'épreuves.
« L'édition est un métier. S'il y a deux choses que Livres en folie a stimulé en dix-sept ans, on peut citer l'envie d'écrire de plus en plus grande chez toutes les couches de la population et l'éclosion de maisons d'édition. Il faut renforcer ces dernières pour leur permettre d'offrir des services de qualité aux auteurs et en bout du compte aux acheteurs-lecteurs », soutient Duval.
L'université Caraïbe, des formateurs venus de France et du Canada assumeront la transmission des savoirs.
Le livre ne se laisse plus enfermer entre les couvertures souples ou cartonnées. L'objet s'est dématérialisé. Le livre numérique sera présent à Livres en folie grâce à une multitude de partenaires comme l'OIF, l'AUF, les Presses Nationales et la Banque de la République d'Haïti. Chacune de ces institutions ont des projets qui leur permettent de mettre au service de la population des livres sous forme numérique.
La technologie sera bien présente à Livres en folie. Que cela soit pour faciliter les ventes on line, pour permettre aux villes de province de participer en temps réel à la fête ou pour rendre possible le fonctionnement de la plus grande librairie du pays le temps de la foire avec tous les supports que cela nécessite.
Livres en folie est une grande machine et chacun se donne à cent pour cent pour garantir sa bonne marche », conclut optimiste Duval.
Livres en folie est possible chaque année grâce à l'engagement de ses initiateurs : Le Nouvelliste et la Unibank, mais il vit aussi grâce à ses sponsors : Air Caraïbe, la Brasserie la Couronne, le Ministère de la Culture et de la Communication, le Rhum Barbancourt et Voila.
Il est appuyé par : l'Agence Universitaire de la Francophonie (AUF), l'Association Haïtienne des Professionnels du Livre (AHPL), la Direction Nationale du Livre (DNL), la Fondation Connaissance et Liberté (Fokal), l'Institut Français en Haïti, la librairie La Pléiade, l'Organisation Internationale de la Francophonie (OIF), le Parc Historique de la Canne à Sucre.
Il est réalisé grâce à : Bibliothèque Nationale d'Haïti, Communication Plus, Maison Henry Deschamps, Les Edition de l'Action Sociale, les Editions Choucoune, les Editions CUC, les Editions Fardin, Editions des Presses Nationales d'Haïti, Editions de l'Université d'Etat d'Haïti
http://www.lenouvelliste.com/article.php?PubID=1&ArticleID=93656&PubDate=2011-06-10
Commentaire
Merveilleuse fête dans un pays en ruines! D'ailleurs pourquoi pas? Est-ce que la connaissance n'est pas ce second souffle qui permet à un peuple éprouvé par toute sorte de vicissitudes de reprendre confiance, se relever et avancer malgré tout, sans regarder en arrière, sans se laisser abattre par le malheur? Quand il ne resterait plus rien, absolument rien avec quoi compter, nous pourrions encore avec la connaissance, compter sur les ressources que nous conservons en nous. Celles-là, elles nous accompagnent partout. C'est la seule chose que nous puissions posséder vraiment.
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