• Dans une tribune publiée lundi 16 août, une centaine d’intellectuels appellent la France à rembourser à Haïti la « dette de l’indépendance » : 90 millions de francs or, soit aujourd’hui quelque 17 milliards d’euros, exigés par la France en 1825, sous le règne de Charles X, en échange de l’affranchissement du pays, et destinés à « indemniser » les colons.
En juillet dernier, un faux site du ministère français des affaires étrangères avait annoncé avec fracas l’intention de la France de rembourser les sommes indûment perçues. Bien que le New York Times ait cru y voir la patte du duo satirique des Yes Men – coutumier de ce mode opératoire –, ce coup d’éclat était l’œuvre d’un collectif de militants baptisé Comité pour le remboursement immédiat des milliards envolés (Crime). Le gouvernement français avait déclaré envisager des poursuites judiciaires. Le faux site avait été fermé, mais il est réapparu à une autre adresse pour relayer l’appel publié lundi.
« Nous croyons que l’idéal d’égalité, de fraternité et de liberté cher à la France serait beaucoup mieux servi si, au lieu de dilapider les fonds publics dans des poursuites contre les auteurs du canular, le gouvernement français commençait à rembourser à Haïti les 90 millions de francs or qui lui furent extorqués suite à son indépendance », écrivent les signataires, parmi lesquels figurent notamment Noam Chomsky, Mike Davis, Naomi Klein, Christine Delphy, Eduardo Galeano ou encore Jacques Rancière.
« Haïti continue à payer, au prix fort, les conséquences de sa naissance, écrivait Christophe Wargny dans Le Monde diplomatique en février 2010, après le tremblement de terre du 12 janvier qui a fait plus de 220 000 victimes (« Haïti, la tectonique de la misère »). Le moins qu’on puisse dire est que son avènement, entre 1802 et 1804, n’était pas souhaité. Faute de tuer le nouveau-né, les pays occidentaux, la France de Napoléon Bonaparte en tête, ont tenté d’étouffer l’enfant adultérin de la Révolution française. Le pays connut alors la pire saignée de son histoire, pire encore que celle de 2010 : celle de la guerre d’indépendance. Haïti, seule révolte d’esclaves qui ait accouché d’un Etat, est né du rejet du colonisateur français. Crime de lèse-majesté du Nord. » Benjamin Fernandez renchérissait : « L’affront du pays révolté à la grandeur de l’ancien empire pourrait expliquer que, de toute son histoire, jamais un chef d’Etat français n’ait mis le pied sur le sol haïtien » (« Bataille humanitaire à Haïti »). M. Nicolas Sarkozy devait rompre avec cette tradition quelques jours plus tard, pour une visite historique de… quatre heures, au cours de laquelle il admettait : « Ne nous voilons pas la face. Notre présence ici n’a pas laissé que de bons souvenirs. »
Le médecin Paul Farmer, de l’organisation humanitaire Partners in Health, écrivait pour sa part dans nos colonnes, en juillet 2003 : « Un diplomate français nous confiait récemment, sans ironie aucune, que, sous la présidence de François Mitterrand, “Haïti devait encore une part de cette dette” » (« Haïti, l’embargo et la typhoïde »).
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Commentaire
Quel manque de sérieux de la part de ceux qui mettent encore en doute que cette dette a ruiné toute possibilité de développement d'Haïti avant même que ce pays ne fasse son premier pas!
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