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jeudi 2 décembre 2010

Mirlande H. Manigat, confiante, se pose en rassembleuse




Haïti: Tailleur bleu marine, chemisier vert d'eau, chignon strict, maquillage léger, lunettes sur le nez, trois rangs de collier, tour de cou et sautoir et un sourire illuminant son visage moins fatigué depuis qu'elle n'est plus en campagne, Mirlande H. Manigat, sûre de devenir présidente, a appelé au ralliement à sa candidature, prévenu qu'elle veillera aux grains au second tour et expliqué son «revirement » après avoir fait seule une declaration à la radio et approuvé par la suite , à l'hotel Karibe, une déclaration "hâtive" d'annulation du scrutin du dimanche 28 novembre avec d'autres candidats à la presidence.

« Je sais et vous savez que je serai le président d'Haïti parce que c'est vous qui le voulez », a-t-elle dit, professoral, assise derrière un bureau métallique envahi de magnétophones lors d'une conférence de presse le mercredi 1er décembre 2010.

« Je dis à tous les candidats dans la course que je les attends pour dialoguer, pour faire front commun », a appelé Mme Manigat, paumes vers le plafond, un bicolore national à sa droite et une photo du « roi bâtisseur » et « tyran éclairé » Henri Christophe accrochée au mur derrière elle. « Je dis aux partisans des autres candidats que nous sommes les enfants d'un seul pays, d'un pays malade qui a besoin de tout le monde », a-t-elle renchéri, persuadée qu'elle sera au second tour, sans voler la préséance au CEP, l'institution légalement habilitée à donner les résultats.

Ferme, sans pourtant hausser le ton, l'épouse de l'ex-président Leslie Manigat presse les acteurs impliqués dans l'organisation des élections à rectifier le tir. « Nous demandons au CEP, au gouvernement, aux membres de la communauté internationale engagés dans le processus de donner l'entière garantie que les brigandages constatés lors du scrutin dimanche ne se répèterons pas », a-t-elle dit devant un parterre de journalistes de la presse locale et internationale. Continuer >





Revenant sur son revirement, son switch, son grand écart en laissant en rase campagne les autres candidats à la présidence ayant comme elle approuvé la déclaration d'annulation du scrutin quelques heures avant la fermeture des bureaux de vote dimanche, Mirlande H. Manigat a multiplié les arguments pour expliquer son positionnement. « J'ai approuvé le contenu, la demande d'annulation. Je n'étais pas d'accord qu'on cite mon nom comme signataire d'un texte à la rédaction duquel je n'avais pas participé », a-t-elle dit, le regard perçant.

« Je n'ai pas laissé la table parce que j'ai pensé que ce serait laid si je l'avais fait », a poursuivi Mirlande H. Manigat, en soulignant dans la foulée que sa « décision de demander l'annulation du scrutin n'était pas hâtive». « Cette décision était opportune, justifiable », a-t-elle avancé en se basant sur des infos qu'elle dit avoir collectées auprès de ses collaborateurs et partisans sur le terrain, faisant état de magouilles et de désordres dans des centres de vote dans l'Ouest et dans d'autres départements du pays, sans pointer du doigt un secteur en particulier.

« Seul le CEP a autorité pour annuler les élections. Je lui ai demandé de le faire. Il ne l'a pas fait. Donc, le processus se poursuit», a enchaîné la détentrice d'un doctorat en sciences politique de la Sorbonne qui se présente comme celle qui ne lâche pas le peuple, qui entend les cris et les appels à ne pas abandonner le front.

Solennelle, Mirlande H. Manigat, qui avait cependant jeté l'éponge en dépit d'une confortable avance pour gagner un siège au Sénat presque acquis en 2006, a rappelé qu'elle est toujours candidate à la présidence. Le ton pas moins auguste mais reconnaissant, elle a remercié ses électeurs et invité à la vigilance au second tour. « Soyez prêts à protester si on veut voler votre vote », a-t-elle dit en évoquant son respect du verdict des urnes qui sera communiqué par le CEP dans les jours à venir, précisant qu'elle s'inclinera si ce verdict est cohérent.

Refusant d'anticiper, elle a toutefois fait une exception en concédant qu'elle accepterait une cohabitation avec le parti majoritaire au Parlement, même si cet exercice du pouvoir, comme en France, est très difficile. Entre-temps, les regards sont rivés sur le centre de tabulation et les politiques réfléchissent aux alliances, accords et cherchent des parades contre les bourdes, les faux pas, les obstacles sur le chemin de la présidence en Haïti, un pays exsangue en proie aux déferlements de la nature et à la bêtise de ses enfants, qui, selon Mirlande H. Manigat, doivent mettre la main à la pâte, « se rassembler ».

Roberson Alphonse
ralphonse@lenouvelliste.com

http://www.lenouvelliste.com/article.php?PubID=1&ArticleID=86287&PubDate=2010-12-01

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