La Banque mondiale esquive le tacle, selon certains, irrégulier du Premier ministre Jean-Max Bellerive. Calmement, Pamela Cox, vice présidente de la BM pour l'Amérique Latine et la Caraïbe revient sur les frais de gestion, le temps de décaissement et souligne que la première demande de financement du gouvernement d'Haïti n'a été déposée que le 17 juin.
Haïti: « Nous avons clarifié pour le Premier ministre Jean-Max Bellerive ce que sont nos procédures. Nos frais de gestion sont moins coûteux et le temps de traitement des dossiers est moins long qu'il ne le pense », a expliqué Mme Pamela Cox, vice-présidente de la Banque mondiale pour l'Amérique latine et la Caraïbe, le mardi 3 août 2010. Décontractée, Mme Cox a qualifié de « fructueuse » la rencontre avec le chef du gouvernement et coprésident de la CIRH.
« Je pense qu'il comprend maintenant. Les frais de gestion sont prélevés dans le fonds multidonateurs, et les bailleurs le savent », a précisé la vice-présidente. « Ces frais, a-t-elle poursuivi, permettent de s'occuper des formalités administratives et d'autres aspects techniques en vue de satisfaire les parlementaires des pays donateurs qui veulent savoir si les taxes payées par leurs concitoyens sont dépensées de manière efficace et dans le respect de la sécurité environnementale, sociale et financière. »
« Nous avons un taux de base unique. Nous prélevons 2.5 % de la somme allouée au projet. Et, à partir de 10 millions de dollars et plus, nous prélevons une seule charge de 350.000 dollars », a ajouté Pamela Cox qui, dans la foulée, a souligné l'intérêt des bailleurs pour les fonds multidonateurs (trust fund). « C'est moins coûteux, et les bailleurs n'ont pas à embaucher une meute de consultants », a-t-elle indiqué.
Comme parade aux frais de gestion, Pamela Cox indique avoir donné quelques conseils au Premier ministre Bellerive. « Compte tenu du fait que ceux-ci sont prélevés par rapport à la taille et au montant du projet, nous avons suggéré au gouvernement d'avoir un parapluie de projets pour les petits dons afin qu'il y ait une seule charge. »
Quant aux critiques de Jean-Max Bellerive sur la durée des "analyses techniques" des projets pouvant aller de 6 à 8 mois, Pamela COX, a confié que la première demande du gouvernement pour un financement par le Fonds pour la Reconstruction d'Haïti (FRH) a été déposée le 17 juin, et, le même jour, le comité de pilotage a alloué 30 millions pour la prestation de services essentiels à la population haïtienne par l'intermédiaire de la Banque mondiale. « Ce n'est pas rapide, ça ? » s'est-elle interrogée sur un ton empreint d'humour.
Les donateurs se sont engagés en mars à fournir environ 500 millions de dollars sur le 5.5 milliards promis. A date, cinq bailleurs ont confirmé leurs engagements pour un montant total de 97,5 millions dont 67 millions ont déjà été reçus, a par ailleurs indiqué Madame Cox.
Jonglant avec les chiffres, cette détentrice du Ph. D en économie et politique du développement est revenue sur les actions de la BM dont l'effacement de la dette de 39 millions de dollars d'Haïti, l'investissement de 68 millions de dollars pour répondre aux besoins sociaux et sur les reconstruction depuis janvier 2010, les 49 millions alloués au secteur privé et les 91 millions injectés à l'Agence internationale de développement.
« La réponse initiale de la Banque suite au tremblement de terre s'est concentrée sur l'amélioration des conditions de vie des personnes touchées tout en contribuant à jeter les bases d'une reconstruction à long terme. Les 240 millions de dollars mis à la disposition d'Haïti à ce jour ont permis d'évaluer l'impact de la tragédie, de préparer et mettre en place l'infrastructure d'urgence et les projets destinés au secteur de l'enseignement, aux communautés », a-t-elle indiqué.
Pour sa part, la Directrice générale du groupe de la Banque mondiale Sri Mulyani Indrawati, a indiqué qu'elle comprenait les impatiences. Mais, a-t-elle nuancé, il faudra être patient car le gouvernement haïtien a été gravement affaibli par le tremblement de terre du 12 janvier. Confiante que les difficultés ont été surmontées et les incompréhensions dissipées au terme de sa rencontre avec le Premier ministre Bellerive, Madame Indrawati, ex-ministre des Finances de l'Indonésie ayant acquis une solide expérience dans la gestion post-catastrophe - surtout après le tsunami ayant frappé son pays -, dit attendre les prochains projets de la CIRH dont le rôle est crucial dans le processus de reconstruction.
Le tacle de Bellerive
Le 28 juillet 2010, en marge de la visite de Michel Barnier, Commissaire européen en charge du marché intérieur et des services, le Premier ministre Jean-Max Bellerive s'est violemment emporté contre la Banque mondiale.
« Je ne peux pas payer les taux de commission exigés par la Banque mondiale. Je ne peux pas non plus attendre qu'elle mette 6, 7, 8 mois pour faire la révision technique d'un dossier approuvé par la Commission Intérimaire pour la Reconstruction d'Haïti (CIRH) », avait-il clamé, fort de l'appui de l'ex-président Bill Clinton, l'autre coprésident de la CIRH. « La banque, avait-il dit, ne peut pas considérer Haïti comme un pays qui vient emprunter de l'argent pour construire un pont ou un barrage. »
Le 8 juillet, dans une tribune publiée dans le New York Times, Jean-Max Bellerive et Bill Clinton avaient fait la leçon à la BM. « En tant que gardienne du Fonds multidonateurs, la Banque mondiale a la responsabilité de s'assurer que l'argent promis, qui provient des taxes des contribuables à travers le monde, soit délivré rapidement au gouvernement haïtien ou pour les projets approuvés par la CIRH. »
A l'issue de la conférence de presse donnée par les membres de cette délégation de la Banque mondiale venue dissiper les malentendus et examiner les progrès réalisés en Haïti après le tremblement de terre du 12 janvier, certains disent que le Premier ministre Bellerive aurait commis un anti-jeu en effectuant un tacle irrégulier contre la Banque mondiale, car, à date, seulement un projet a été déposé et financé le même jour par la FRH créée par la BM. Où sont les projets ? Attendez le 17 août, répondent les optimistes qui estiment que les institutions financières internationales ne doivent en aucun cas être le bouc-émissaire de ceux qui font semblant ou qui n'ont tout simplement pas le savoir et les moyens de leur politique....
Roberson Alphonse
ralphonse@lenouvelliste.com
http://www.lenouvelliste.com/article.php?PubID=1&ArticleID=82021&PubDate=2010-08-03#Suite
Commentaire
...Et l'on nous dit encore que ces gens sont capables de gérer un pays? Jamais de projet, jamais de plan ! Tout peut s’improviser ! Il faut être d'une naïveté très prononcée pour leur faire confiance. D'ailleurs, ceux qui traitent directement avec eux, ces politiciens haïtiens, doivent avoir appris de visu de quel bois ils se chauffent. Ils mêlent l'arrogance à l'ignorance et veulent tout faire sans formalité, sans préalable. Ce qui, dans l'état actuel des choses en Haïti pourrait exceptionnellement se justifier. Mais eux, les profiteurs de la politique haïtienne, n’ont-ils jamais appris l'art de la modération? C'est parce qu'ils n'ont jamais été modérés (dans leur ambition aveugle, délire d’enrichissement rapide) que leur impatience n'émeut point. Malheureusement pour Haïti!
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