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mardi 2 août 2011

21 juin 2011 - 4 avril 1995 ma réponse a l'article de Daly Valet intitule "Ensauvagement!"

Je comprends si bien ta frustration… Un autre « poto mitan » de notre société – une autre encyclopédie, dédiée à changer le statu quo, et prête à mettre la main à la pâte pour apporter un changement pour le mieux de notre pays.

29/07/2011

Cher Daly,

Je comprends si bien ta frustration… Un autre « poto mitan » de notre société – une autre encyclopédie, dédiée à changer le statu quo, et prête à mettre la main à la pâte pour apporter un changement pour le mieux de notre pays. L’architecte d’une meilleure qualité de vie pour tout un chacun, disparu du jour au lendemain… enlevé par un groupe de "malfektè", sans nom et sans âme.
L’enquête se poursuit ? Toujours le même déjà vu ?
Tu te sens si révolté, si dégouté. Une fois de plus ! Le même scenario !
Tu demandes « quoi », mais qui répondra ?
Nous ne sommes ni le Chef de la Police, ni le commissaire du Gouvernement, ni le Ministre de la Justice ou le Secrétaire d’Etat à la Sécurité Publique.
Nous ne sommes pas des « chefs ». Le pouvoir ne nous appartient pas.
Hélas, nous sommes si impuissants… juste des participants neutres et détachés devant ce spectacle affreux et cruel.
Sommes-nous vraiment si impuissants ou souffrons-nous en réalité d’une apathie chronique, qui nous permet de tourner le dos confortablement et à chaque fois, en nous faisant croire que nous ne sommes pas concernés. Heureusement ce n’était pas moi… « Il l’a cherché » – « pourquoi avoir fouillé dans ce dossier » – « pourquoi avoir parlé trop fort » – « pourquoi ne pas avoir été silencieux »… tant d’excuses, tant d’explications pour nous donner bonne conscience.
Pourtant, en observant les réactions d’un peu partout, je dois dire que cette fois-ci la société toute entière semble se réveiller, se révolter et dire haut et fort « plus jamais ». Fini les meurtres, fini l’impunité…
L’enterrement du 21 juin dernier m’a renvoyée 16 ans en arrière… au 4 avril 1995. C’était aussi à l’église Saint Pierre, avec une foule dans l’attente de pouvoir payer ses respects. Des policiers encerclaient l’église, cette fois-là, pas en attente d’un dignitaire, mais plutôt pour éviter des dérapages et pour donner une sécurité à la paroisse, dont les représentants ont été menacés plusieurs fois durant les jours précédant les funérailles. Ce 4 avril, la défunte est arrivée en retard… le prêtre est arrivé en retard. L’église était pleine à craquer et les caméras ne s’arrêtaient pas de cliquer.
Le cercueil était aussi ouvert et partiellement couvert par le drapeau … la victime avait reçu des balles la défigurant au point ou même un maquillage expert ne pouvait plus cacher la brutalité et la cruauté des attaquants… comme il a été le cas de Guiteau Toussaint.
Il y avait cependant une très grande différence entre le 21 juin et ce jour du 4 avril 1995… aujourd’hui, cette grande peur palpable et omniprésente d’alors n’était pas au rendez-vous; les jours précédant l’enterrement, personne n’était forcée d’entendre les propos d’un journaliste renommé de la place qui « s’en torchait le cul avec la mort de cette garce » (sic). Aucune porte parole du gouvernement ne déclarait, à haute et intelligible voix, que la victime « avait mérité son sort ». La société, aujourd’hui, contrairement à celle de l’époque des évènements du 28 mars 1995, n’est pas restée muette.
En 1995 personne, à part les membres de la famille, des amis et collaborateurs proches, n’a condamné publiquement ce meurtre – sauf un étranger, un américain, qui, par ironie de la vie, a été si souvent la cible de critiques violentes de la défunte. Lui seul lui rendait ce respect et cet hommage que ni le Barreau de Port-au-Prince, ni les associations de droits de l’homme ou de la femme ni la société civile ne l’ont fait.
Même aujourd’hui, 16 ans après, qui élève sa voix pour condamner publiquement et officiellement le meurtre de Maître Mireille Durocher Bertin? Est-ce toujours la peur ou choisissons-nous de souffrir une fois de plus de notre amnésie partielle volontaire ? En condamnant publiquement le meurtre de Guiteau Toussaint nous avons fait un grand pas en avant et dans la bonne direction. Espérons seulement que cette mobilisation durera au-delà de l’espace d’un matin et ne sera pas enterrée avec la victime … comme elle a été enterrée si souvent déjà dans le passé.
La police et la justice doivent faire leur travail, certes, mais nous, nous devons au moins avoir la décence et le courage de nous révolter tous ensemble pour dire d’une voix commune « NON » :
NON, Nous ne voulons plus accepter cette impunité qui détruit les chances d’une amélioration de la qualité de notre vie dans l’embryon.
NON, Nous ne voulons pas léguer ce pays dans son état actuel à nos enfants.
NON, Nous ne voulons plus continuer à pleurer aujourd’hui et tout oublier demain.
NON, Nous refusons de vivre dans un pays qui tolère et accepte ces anomalies comme norme en fermant nos yeux et enfermant tous ces problèmes dans un tiroir le lendemain matin.
Assez est assez.
Après les longues années de léthargie profonde, commençons-nous à nous atteler à l’édification des bases d’une société plus responsable, plus juste, plus saine ?

Je l’espère de tout mon cœur.
A bientôt
Anne-Rose Schoen

Commentaires des lecteurs
jojoline | 01/08/2011
Madame Schoen, J'ai lu votre article et j'ai compris. Juste pour vous dire que je partage votre réflexion sur les souffrances que nous font subir des gens de nos connaissances ou parfois qui le font pour le compte d'autrui mal intentionné. Oh des crimes gratuits... qui sèment la terreur dans nos rangs!!! Oh que c'est triste de laisser planer le doute dans le cœur de personnes qui ne savent ou ne veulent pas dénoncer leur criminel de peur de faire assassiner les gens de leur entourage!!! Il est temps que les Haïtiens arrivent à mettre de coté leur peur et de revendiquer leur droit a la vie saine. Nous ne pouvons pas toujours pleurer nos morts dans le silence. Quand une bévue a été commise, il faut que la justice s'il y en a UNE en Haïti fasse son travail équitablement. Or j'irai plus loin... la justice ne devrait prendre en considération des gens qui perpétuent le crime soi-disant qu'ils font partie du gouvernement ou étant les amis du gouvernement. CELA DOIT S'ARRETER!!! Il y a entre-nous une GRANDE HAINE qui fait que la société dans laquelle nous vivons est très malade. On nous fait du mal et on s'efforce de rire parce que nous voulons avoir la vie sauve... Moi, je dis, vaut mieux MOURIR la tête haute au lieu de couver la souffrance provoquée par quelqu'un de votre entourage. Il faut dénoncer ses malfrats qui nous causent des blessures irréparables. En gardant silence, ils sauront qu'ils ont le pouvoir de démanteler tout sur leur passage. NON... que cette haine s'estompe... NON, que la violence humaine s'estompe... NON, les crimes gratuits doivent s'estomper... Nous ne pouvons pas continuer à NIER ces crimes. Comme vous chère madame, j'aimerais que le tribunal des grandes instances en Haïti prenne ses responsabilités pour juger toute personne fautive de crimes, de kidnapping causant la mort, de magouilles, de perversion, de fraudes, de complots contre la personne, d'abus de pouvoir qui provoque un déséquilibre mental d'autrui. Cela n'a pas de sens que nous vivons aujourd'hui avec la peur parce que le mental des gens est disloqué. Combien de parents, amis qui viennent se faire soigner à l'étranger pour cause de crimes odieux vécus par leur famille ou par eux. Les Haïtiens ne comprennent pas l'IMPORTANCE DE DENONCER. Vaut mieux mourir en dénonçant que de mourir en gardant le silence... on mourra quand même.

http://www.lematinhaiti.com/contenu.php?idtexte=24919&idtypetexte=

Commentaire
Les criminels tapis dans l'ombre de l'impunité veillent toujours pour voir ce qui va se passer. Mais en dénonçant constamment, en rappelant, en rendant toujours présentes leurs scélératesses, nous leur enlevons le sommeil, nous leur disons que la perversion de la conscience a aussi ses limites. On peut mentir aux autres, les intimider, les faire assassiner quand ils ne pensent pas comme nous, mais il y a cette voix, celle qui poursuivait Caen qui ne s'éteint jamais. A moins que la folie (qui malheureusement n'est pas exclusivement le sort des criminels) ait pris la place de la lucidité. Mais cela aussi est un prix à payer quand on choisit le crime plutôt que la tolérance caractéristique des sociétés véritablement civilisées.

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