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mercredi 24 août 2011

L’ULCC menace, le parquet répond

Le directeur général de l’Unité de lutte contre la corruption (ULCC) Amos Durosier a écrit au Chef du parquet de Port-au-Prince, Me Sonel Jean François pour lui demander de suspendre temporairement l’enquête ouverte sur les accusations de corruption qui pèsent sur le ministère de l’Intérieur et des Collectivités territoriales.
23/08/2011
Le directeur général de l’Unité de lutte contre la corruption (ULCC) Amos Durosier a écrit au Chef du parquet de Port-au-Prince, Me Sonel Jean François pour lui demander de suspendre temporairement l’enquête ouverte sur les accusations de corruption qui pèsent sur le ministère de l’Intérieur et des Collectivités territoriales. Il dit vouloir éviter toute « confusion » puisque sa direction a déjà engagé une enquête sur le même dossier. Me Jean François rétorque que l’existence de l’ULLCC ne saurait réduire les attributions du parquet qui est chargé de rechercher les infractions au terme de l’article 8 du code d’instruction criminelle.
Nous publions les deux lettres

Unité de Lutte Contre la Corruption (ULCC)

Port-au-Prince, le 11 août 2011
Monsieur Sonel Jean-François Commissaire du gouvernement a.i. Près le Tribunal Civil de ce ressort, Parquet

Ce mercredi 10 aout 2011, l’Unité de Lutte Contre la Corruption (ULCC) a eu connaissance des déclarations que vous avez faites dans les médias concernant l’invitation adressée au Ministre de l’intérieur et des collectivités territoriales (MICT), Monsieur Paul Antoine Bien-Aimé pour l’entendre dans le dossier relatif aux accusations de corruption contenues dans le rapport du Réseau National de Défense des Droits Humains (RNDDH) rendu public à la fin du mois de juillet 2011. Dans votre intervention, vous avez également mentionné que vous vous rendriez, la semaine prochaine, dans les bureaux du Ministère de l’intérieur et des collectivités territoriales à l’effet de poursuivre votre enquête.
La direction générale de l’Unité de Lutte contre la Corruption (ULCC ) rappelle qu’elle a été saisie par votre Parquet ,le 3 aout 2011 ,à l’effet d’enquêter sur cette affaire ,votre courrier coïncidant avec la décision déjà prise en ce sens au niveau de l’institution. Ainsi, à la date du 1er aout 2011, une équipe d’enquêteurs a été mise sur pied à l’effet de recueillir des informations sur les faits dénoncés conformément aux dispositions de l’article 11 du décret du 8 septembre 2004,qui donne à l’ULCC compétence pour constater les infractions de corruption ,à en rassembler les preuves, à en rechercher les auteurs et à les déférer à la justice.
Aussi, la direction générale de l’ULCC se voit-elle dans l’obligation de vous informer qu’elle sera contrainte de surseoir à son enquête, si votre Parquet entendait continuer simultanément une enquête parallèle, et ce, par souci d’éviter toute confusion.
Amos Durosier, Directeur Général

La réponse du Chef du parquet :

Ministère de la Justice et de la Sécurité Publique Parquet du Tribunal Civil de Port-au-Prince.
Monsieur Amos DUROSIER Directeur Général de l’Unité de Lutte Contre la corruption (ULCC). En ses Bureaux,
Monsieur le Directeur Général,
Le Commissaire du Gouvernement près le Tribunal de première Instance de Port-au-Prince a lu avec stupéfaction votre correspondance en date du 11 août, dans laquelle vous vous plaignez de ce qu’il s’est proposé de se transporter au Ministère de l’Intérieur dans le cadre de l’enquête préliminaire ouverte sur les faits soupçonnés de corruption relatés dans le rapport du Réseau National de Défense des Droits Humains (RNDDH).Vous avez même osé, au mépris des principes de confidentialité et de sérieux qui doivent guider les actes de l’ULCC, diffuser cette lettre en acheminant copie au Ministre de l’Intérieur, le sieur Paul Antoine BIEN-AIME sous enquête et prendre ouvertement partie en menaçant de surseoir aux investigations au cas où le Chef du Parquet se rendrait, comme annoncé, à ce Ministère.
Monsieur le Directeur Général,
Il est clair que le décret du 8 Septembre 2004 confère à l’ULCC les prérogatives de constater les infractions de corruption, d’en rassembler les preuves, d’en rechercher les auteurs et les déférer à la justice. Mais ce texte n’enlève pas au Commissaire du Gouvernement son rôle d’Officier de Police Judiciaire attribué par l’article 8 du CIC, qui l’habilite à rechercher les infractions, réunir les indices pour en déférer les auteurs aux tribunaux. D’autant que, dans l’espèce présente, il n’y a pas que des agents de l’Etat en fonction à être soupçonnés.
Votre attitude, pour le moins suspecte, préoccupe le Parquet au plus haut point. Car, déjà, elle met en doute la crédibilité du rapport à sortir. Ce qui ne constitue une garantie ni pour la société ni pour les suspects.
Le Commissaire du Gouvernement saisit l’occasion pour vous transmettre, Monsieur le Directeur Général, ses salutations patriotiques.

Sonel JEAN-FRANCOIS, av Commissaire du Gouvernement a.i.

publié par
Eddy Laguerre

Commentaire
Dans cette affaire de corruption, il est évident qu'il y a beaucoup à cacher. Mais qui veut-on protéger? Préval, pour obtenir sa bénédiction au parlement où il jouit de la majorité que la fraude lui a procurée? Les parlementaires dont les accusations de corruptions (des chèques parallèles...) sont à l'ordre du jour? Le ministre mentionné et comparse, qui ridiculise la justice en plein jour et avec une facilité qui fait frémir? Car cette ironie de la justice, cette arrogance provocatrice ne s'observent en général que chez les mafieux qui savent à quoi s'en tenir dans presque toutes les circonstances, persuadés d'être au dessus de tout. Qui corrompt qui et pourquoi faire taire la justice? Cet étalage de provocations et de mépris pour les institutions du pays, dont la justice, montre jusqu'à quel point le pays, gouverné par de tels énergumènes, est pourri. Exception faite, évidemment de ses humbles habitants qui n'ont jamais voix au chapitre.

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