Nombre total de pages vues

lundi 17 janvier 2011

Jean Claude Duvalier revient dans un pays qui a choisi la démocratie

Ce 16 janvier, le pouvoir en place qui ne peut imposer son candidat, le retour de Duvalier au pays et toutes les opinions qui s'expriment, la démocratie haïtienne montre toutes ses potentialités et n'est jamais apparue un aussi beau système en dépit de ses ratés
Haïti: C'est sous les applaudissements des quelques centaines de sympathisants et de curieux massés depuis des heures devant l'aéroport Toussaint Louverture, qui a longtemps porté le nom de son père François Duvalier, que Jean Claude Duvalier a fait ses premiers pas en Haïti ce dimanche 16 janvier, vingt cinq ans après avoir laissé le pays à l'aube du 7 février 1986 pour fuir une série de manifestations.
Assis à l'arrière d'un puissant 4x4, escorté par un agent de la Police Nationale d'Haïti, Duvalier a pris la direction de l'hôtel Karibe sur les hauteurs de Port-au-Prince suivi par un cortège qui bénéficie d'une escorte de la police et de la Minustha, les troupes des Nations Unies en poste en Haïti.
Les journalistes qui ont fait le pied de grue tout l'après-midi pour attendre l'avion de la Air France qui a ramené l'ancien dictateur s'empressent de grimper dans des voitures ou sur des motos pour le suivre.
La foule devant l'aéroport continue de chanter « si Jean Claude était là nous ne serions pas ainsi » en référence à la misère et au choléra qui déciment la population de la capitale qui ne se remet toujours pas du tremblement de terre, un an après le terrible séisme qui a dévasté Port-au-Prince et d'autres ville du pays.
Si la présence de la police et de la Minustah intriguent certains journalistes, d'autres observateurs rappellent que tous les anciens présidents haïtiens (Le dernier en date est Leslie Manigat) ont droit à une série de privilèges : voiture blindée, une présence policière pour leur sécurité rapprochée et ont une pension. Jean Claude Duvalier qui dispose d'un passeport diplomatique depuis le gouvernement de transition entre 2004 et 2006 avait à plusieurs reprises fait part de son désir de revenir dans son pays.
Autre question qui taraude la presse : Jean Claude Duvalier est-il le bienvenu ? Visiblement les autorités ne l'attendaient pas même si certains de ses proches avaient été informés de cette escapade.
La rumeur de l'arrivée imminente de Jean Claude Duvalier a fait son apparition vers 2 heures 30 ce dimanche tranquille dans les milieux journalistiques. Quelques heures plus tard des sources des Antilles françaises ont confirmé la nouvelle avant que l'ambassade de France en Haïti l'authentifie officiellement.
« Monsieur Duvalier a embarqué à Paris sans que cela ne déclenche d'alarme. Il a un passeport haïtien et aucune interdiction de laisser le territoire français », a indiqué au Nouvelliste, notre source.
Interrogé par le journal, un proche de la présidence haïtienne a affirmé n'avoir pas été informé de cette arrivée. Des responsables de la Police Nationale d'Haïti ne savaient pas non plus quelle conduite tenir face à cette arrivée impromptue avant que des instructions ne soient passées de recevoir Jean Claude Duvalier avec les honneurs dus à son rang.
La Minustah n'avait pas de commentaires sur le sujet dimanche en début de soirée. « Nous n'avons pas été avertis de cette arrivée », s'est borné à dire un responsable joint au téléphone par le journal.
Les services du commissaire du gouvernement questionnés par Le Nouvelliste ont déclaré, sous réserve d'autres informés, qu'il n'y a pas de mandat pendant contre Jean Claude Duvalier, ni de demande d'arrestation, ni poursuite ouverte en Haïti.
Pour d'autres sources, Haïti a toujours voulu à l'argent des Duvalier, ce trésor introuvable depuis 25 ans, jamais à sa personne. De 1986 à 2011, cela fait 25 ans que Baby Doc est parti, y a-t-il prescription pour tous les crimes et délits que l'on pourrait reprocher à Jean Claude Duvalier ? On le saura dans les jours qui viennent.
L'exilé Jean Claude Duvalier qui vivait en France depuis 25 ans n'avait pas de restriction pour rentrer dans son pays, la constitution d'Haïti en vigueur interdit l'exil d'ailleurs. L'article 41 stipule : Aucun individu de nationalité haïtienne ne peut être déporté ou forcé de laisser le territoire national pour quelques motifs que ce soit. Nul ne peut être privé pour des motifs politiques de sa capacité juridique et de sa nationalité. L'article 41.1 précise que : Aucun Haïtien n'a besoin de visa pour laisser le pays ou pour y revenir."
Jean Claude Duvalier, 59 ans, qui a gouverné Haïti sans partage entre 1971 et 1986 est arrivée accompagné de sa compagne Véronique Roy par un vol régulier de la compagnie Air France.
Si des centaines de sympathisants de l'ancien président, dont la famille a gouverné Haïti pendant 29 ans (septembre 1957-février 1986) se sont massés à l'Aéroport pour accueillir l'ancien président, d'autres curieux, qui n'ont pas connu le règne de Duvalier, étaient aussi dans les parages de l'aéroport et commentaient ce revirement spectaculaire.
Michèle Montas, la veuve du Journaliste Jean Dominique a été la première personnalité à désapprouver sur les ondes de Signal FM cette réapparition de Baby Doc sur la scène politique haïtienne. Elle a rappelé pour les jeunes le règne des Duvalier et souligné les limitations de la liberté de la presse à cette époque.
Entre trente et cinquante mille personnes sont mortes ou ont disparu pendant le long règne de 29 ans des Duvalier, père et fils. Le pays s'est vidé de ses meilleurs cerveaux et des dizaines de milliers d'Haïtiens ont du aller se refugier à l'étranger.
Dans des micros trottoirs réalisés à travers les principales villes du pays et dans les rues de la capitale, la radio Signal FM a pu recueillir des réactions de joies et aussi des demandes pour le retour des autres exilés, dont Jean Bertrand Aristide.
Ce retour imprévu de l'ancien président survient alors que Haïti vient de marquer le premier anniversaire d'un séisme meurtrier et que le pays est plongé dans une impasse politique, trois semaines avant la fin du mandat du président sortant René Préval.
Le deuxième tour des élections présidentielles devaient se réaliser ce 16 janvier 2011. Il est renvoyé sine die suite aux désordres qui ont éclaté le 7 décembre après la proclamation des résultats préliminaires du premier tour tenu le 28 novembre.
Le secrétaire général de l'Organisation des Etats Américains (OEA) doit effectuer une visite ce lundi dans la capitale haïtienne pour finaliser avec le président René Préval le sort du premier tour des élections suite au rapport de la commission d'expert de l'OEA qui a évalué les résultats à la demande de René Préval.
Ce 16 janvier, le pouvoir en place qui ne peut imposer son candidat, le retour de Duvalier au pays et toutes les opinions qui s'expriment, la démocratie haïtienne montre toutes ses potentialités et n'est jamais apparue un aussi beau système en dépit de ses ratés.


Frantz Duval
duval@lenouvelliste.com
Imprimer

http://www.lenouvelliste.com/article.php?PubID=1&ArticleID=87864&PubDate=2011-01-16

Commentaire
Pour beaucoup de réserves qu'on ait sur ce retour inattendu, il faut reconnaitre que c'est un signe de la présence sinon de la vigueur de la démocratie qui règne au pays. Duvalier lui-même ne s'y serait pas aventurer s'il avait des doutes. Quant au jugement à porter sur son régime auquel on est nombreux à s’être opposés, il reste beaucoup de questions à éclaircir. Maintenant, il y a un ingrédient à ne pas négliger non plus: Si Duvalier n'a pas hésité à retourner dans les conjonctures que nous savons, c'est aussi parce qu'il sait que ce que les gouvernements de son père et le sien ont fait de négatif et ce qu'ils ont fait de positif en trente ans, bénéficie d'un bilan hautement plus élevé que ce que les Préval et Aristide ont fait en seulement vingt ans. Quel actif attribuer à ces deux derniers? Le néant et la démocratie relative? Le fruit du travail du peuple haïtien et de ceux qui se sont sacrifiés, ou ont été sacrifiés pour nous y conduire. Et il y a des noms d'assassinés, de disparus, et de beaucoup d’autres, qu'on ne peut pas oublier, Brignol Lindor et Jean Dominique en font partie. Mais nous reviendrons sur tout cela.

1 commentaire:

  1. Après la seconde guerre mondiale les Duvalier avec l'aide des USA régneront sur l'ile de 1957 à 1986. Cette dictature a été soutenue par tous les pays occidentaux, et pendant cette période la dette d'Haïti a été multipliée par 20 ; et oui, ça sert aussi à ça un dictateur ! Lorsque «Baby doc» sera chassé du pays, il emportera un magot supérieur à la dette de son pays. La France, pays des droits de l'homme et terre d'asile, l'accueillera. Pillée, Haïti s'enfonce encore un peu plus dans la pauvreté avec l'assentiment de la communauté internationale !

    http://2ccr.unblog.fr/2010/11/05/sommes-nous-tous-des-haitiens/

    RépondreSupprimer