Alternance ou rupture ? Manigat ou Martelly?
Haïti: On sait de quoi dépend l'avenir d'Haïti : de Mirlande Manigat ou de Michel Martelly, tenants et aboutissants de la fin du pouvoir lavalassien au plus haut sommet de l'Etat. Tout cela est logique, si l'on tient compte uniquement de l'impopularité flamboyante du président René Préval. Apparemment, il existe une nuance très grande entre l'alternance et la rupture. L'accession à la présidence d'une personnalité issue d'un parti politique ou d'un milieu opposé au courant lavalassien ne suffit pas à constituer cette rupture tant souhaitée par la grande majorité de nos concitoyens, déboussolés et sonnés par tant d'années vides de paix, de réussite collective et de transparence.
S'agirait-il là d'un épisode inquiétant supplémentaire de notre vie politique ? Et si l'essentiel était ailleurs ?
Il ne suffit pas de gagner le fauteuil présidentiel. Il faut compter aussi avec le Parlement. Qui seront les gagnants ? Qui seront les bénéficiaires ? Et, qui pis est, lesquels parmi eux agiront comme manipulateurs ?
Si la plate-forme présidentielle obtient une majorité confortable dans les deux Chambres, Michel Martelly ou Mirlande Manigat, une fois élu (e) président (e) de la République, devra gérer cette forme inédite de cohabitation. Sommes-nous prêts ? On ne demande qu'à être convaincu. Une autre façon de prévoir la situation future ? Les Haïtiens, de plus en plus excités, ne risquent-ils pas alors de ressentir simultanément une sensation d'intolérance, celle qu'inspire un partage antagonique des pouvoirs, et un sentiment de rébellion devant le blocage de leurs revendications et des attentes qu'ils ont exprimées dans la rue et dans les urnes ?
Tous les Haïtiens qui prêchent l'alternance et la rupture doivent se réjouir du scrutin contrasté du 20 mars 2011. Mais il ne faudra jamais oublier ceci : les deux gagnants de ce premier tour rocambolesque incarnent certainement deux générations, deux personnalités, deux styles, deux projets. La vivacité contre la sérénité. L'expérience politique en face de la volonté d'agir.
Mais cette dualité, prononcée et nette, est aussi une occasion de réfléchir en toute sérénité sur un enjeu incontournable : la reconstruction, qui ne sera pas possible sans la restauration de l'autorité de l'Etat, cet Etat aujourd'hui fantôme, si défaillant, jugé hors jeu par une population anémiée et fatiguée. A cet égard, la victoire de l'un ou l'autre candidat restera dépourvue de tout caractère triomphal : les tâches gouvernementales seront plus redoutables que les péripéties électorales.
Pierre-Raymond DUMAS
http://www.lenouvelliste.com/article.php?PubID=1&ArticleID=89291&PubDate=2011-02-17
Commentaire
Où étaient les éditorialistes quand Préval préparait précisément ce scénario macabre? Quand il s'appropriait le parlement avec toute l'indélicatesse qu'inspire l'esprit de fraude afin de s'assurer d'abord un chemin facile pour faire main basse une nième fois sur la présidence via Célestin, mais, au cas où...se ménager un pied à terre pour mettre des bâtons dans les roues de la justice et freiner toute initiative destinée à lui demander compte des deniers publics? Comme les spécialistes en économie, les journalistes surtout les éditorialistes, arrivent toujours quand on ne peut plus rien faire.
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