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mardi 15 février 2011

L'arnaque des assureurs, la double catastrophe du 12 janvier

Haïti: Plusieurs dizaines d'entreprises haïtiennes parmi les plus importantes et un nombre encore plus considérable de particuliers font face depuis les ravages du tremblement de terre du 12 janvier 2010 à la mauvaise foi de plusieurs compagnies d'assurances avec lesquelles ils traitaient depuis des années, a appris Le Nouvelliste.
Des réclamations portant sur des dizaines de millions de dollars sont en souffrance, assure une source intéressée au dénouement de cette crise qui ne provoque pas de vague.
Cette situation empire de jour en jour. Ni l'Etat haïtien, ni l'Association des assureurs ni aucune des associations patronales ou corporatives ne se proposent comme médiateurs pour trouver une solution au défaut ou au refus de paiement de ces compagnies.
Les assureurs indélicats ou défaillants bénéficient des déficiences des lois sur le secteur des assurances et de la protection qu'accorde le statut de société anonyme, les fameuses S.A., qui les régit et protège leur propriétaire.
« C'est un secteur faiblement régulé et opaque », avoue le ministre de l'Economie et des Finances Ronald Baudin, interrogé par Le Nouvelliste. Le ministre est clair : « l'Etat haïtien ne peut pas répondre du paiement des assureurs en défaillance, il n'avait pas de contrat avec les assurés. »
« Mon assureur refuse de me payer et continue de mener la grande vie avec mon argent », se désole la propriétaire d'un grand hôtel de la capitale qui fait face au refus systématique de son assureur de lui verser la prime qui lui est due après l'effondrement de son entreprise le 12 janvier 2010.
« De plus, je suis impuissante. J'espère qu'il finira par payer, mais les mois passent. Mon entreprise a besoin de cash flow et le temps joue pour l'assureur indélicat », se plaint-elle.
"Indélicat" est un mot faible, se lamente un homme d'affaires qui a vu venir cette fausse faillite de plusieurs des compagnies d'assurances qui opèrent sur le marché haïtien depuis des années.
« De plus, en refusant de payer, ces entreprises portent atteinte à la bonne réputation de leurs pairs qui ont déboursé et elles fragilisent la confiance dans le secteur des assurances, un reflexe qui n'est pas automatique pour les Haïtiens. »
« Les compagnies d'assurances ne sont pas régulées par un organisme de contrôle, ni par une association des assureurs. Personne ne contrôle les placements qu'elles font avec l'argent des clients, ni si elles souscrivent une réassurance pour se couvrir. Aujourd'hui, la société haïtienne découvre effarée l'ampleur des dégâts, une autre catastrophe après celle du 12 janvier. Certains ont tout perdu en dépit du fait qu'ils avaient pris la précaution de souscrire à une assurance tous risques. Pis, l'Etat et les associations qui devaient défendre les victimes se font complices par leur silence », constate un homme d'affaires.
Le silence est le maître mot dans cette affaire. Le moteur de l'arnaque. Les compagnies d'assurances qui refusent de payer les victimes continuent d'assurer de nouveaux clients sans aucun problème. Elles ont encore pignon sur rue.
« Ceux qui savent savent et cherchent ailleurs une nouvelle compagnie. Mais des entreprises et des particuliers échaudés par le 12 janvier et voulant se mettre à l'abri se jettent dans la gueule du loup. Personne ne les met en garde, ne dénonce les assureurs malhonnêtes », regrette cet entrepreneur qui veut garder l'anonymat.
Au niveau des autorités, c'est aussi le silence total. La Banque de la République d'Haïti, qui régule les banques et les coopératives, n'a pas la responsabilité des compagnies d'assurances.
Le ministère de l'Economie et des Finances recommande aux assurés qui se sentent floués de traîner en justice les compagnies et agents d'assurance pour refus de paiement. Mais Ronald Baudin se veut pragmatique et préférerait que soient conclues des ententes à l'amiable.
Le gouvernement haïtien ne souhaite pas une cascade de procès « qui pourrait provoquer l'effondrement d'un secteur d'activité » qui est vital pour l'économie.
« Pour la bonne marche de l'économie, le secteur bancaire a besoin des assurances pour continuer à faire des affaires dans la construction comme dans l'importation, par exemple », explique Baudin.
Avant le tremblement de terre, avec l'appui du Cartac, un organisme du Caricom, les autorités haïtiennes et les opérateurs du secteur travaillaient à réguler le monde fermé des assurances en Haïti et à renforcer les instruments de la supervision.
Le séisme a tout retardé. Le programme a repris. Deux missions sont déjà venues sur place et une troisième est attendue incessamment, a appris le journal.
« On a repris le processus de modernisation enclenché avant le tremblement de terre. Aujourd'hui, on évalue les entreprises qui sont sur le terrain et on va créer un fonds pour renflouer les entreprises viables, pas celles qui sont déjà défaillantes », prévient le ministre de l'Economie et des Finances.
Un an après le séisme, quelles sont les responsabilités et devoirs des compagnies d'assurances envers leurs clients ? Qu'en sera-t-il si une autre catastrophe survient demain ?

Frantz Duval
duvalf@hotmail.com

http://www.lenouvelliste.com/article.php?PubID=1&ArticleID=89170&PubDate=2011-02-14

Commentaire
Quel est l'ingénu qui veut croire que ces compagnies n'ont pas leurs complices au sein même du gouvernement? Connaissez-vous quelqu'un de ce secteur gouvernemental qui confronterait le même problème? Banm van pou mal la Gonav! Bluf

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