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samedi 5 février 2011

Manigat : cap sur le second tour, sans chèque en blanc au CEP


Mirlande H. Manigat croit dans ses chances de devenir la deuxième présidente d'Haïti après Ertha Pascal Trouillot et la première qui sera élue au suffrage universel. Ouverte aux citoyens, aux militants de Inite, elle refuse cependant tout accord formel avec cette plateforme politique dont le candidat, Jude Célestin, a été « éjecté » de la course par le CEP au profit de Joseph Michel Martelly, sans communiquer les scores. L'ex-Première dame, qui croit que ces « résultats sont politiques », a invité le CEP à publier les chiffres, l'écart entre les candidats en lice.
Haïti: Mirlande H. Manigat ne se repose pas sur ses lauriers. Arrivée en tête du premier tour de la présidentielle du 28 novembre, la constitutionnaliste, optimiste, sans se faire d'illusions, cogite déjà sur les stratégies avant le sprint final pour le « fauteuil bourré ». « Je crois que nous allons gagner », confie-t-elle, la voix quelque peu éraillée par une « grippe pachiman », avant une réunion avec ses principaux conseillers à son QG de campagne, à l'avenue Christophe, le vendredi 4 février 2011. Sobre, le ton posé, elle écarte pourtant avec fermeté toute « alliance formelle » avec Inite dont le candidat à la présidence, Jude Célestin, a été éjecté par le CEP. « Il n'y aura pas d'alliance avec Inite dans le sens où l'on s'assiérait pour signer un accord. Non », a indiqué Mirlande H. Manigat, robe longue, chignon stricte, lunettes sur le nez.
Cependant, l'ex-Première dame s'est dit « ouverte à la participation de tout citoyen », membre de la plate-forme présidentielle ou pas, à sa campagne. « Je ne vois pas pourquoi je refuserais de m'asseoir avec un citoyen, de collaborer avec lui », a renchéri Mme Manigat, les bras ouverts en face de son bureau. Si la sorbonnarde est résolument tournée vers l'avenir, elle exprime en revanche son inconfort face l'institution électorale, qui a publié le jeudi 3 février des résultats définitifs de la présidentielle sans les pourcentages justifiant l'écart entre les candidats.
« Ce n'est pas trop grave. Cependant, je pense que les deux candidats, M.M Martelly et Célestin, voudraient bien savoir quelle est la marge entre eux, car, souvenez-vous, le 7 décembre, il y avait à peu près 6 000 votes de différence. Dans le rapport de l'OEA, il y avait moins de 3 000. Alors, quel est l'écart entre les deux ? », s'est interrogée Mirlande H. Manigat.
« J'espère que le CEP va réparer cette omission et publier dans la presse écrite les résultats avec les chiffres correspondants », a-t-elle dit, en trouvant fondée l'hypothèse selon laquelle le CEP a publié des "résultats politiques" en revenant sur les tractations, les pressions de dernière heure de l'international avant la publication des résultats en faveur de Martelly et, selon toute vraisemblance, du président René Préval en faveur de son poulain Jude Célestin.
« En disant que l'on veut le rapport de l'OEA, l'on ne faisait pas allusion à l'authenticité technique du rapport. On faisait allusion aux candidats eux-mêmes. Voilà un élément politique. Il ne s'agissait pas de savoir si l'échantillon était correct, si sur le plan statistique les normes ont été respectées... Le rapport dit que c'est Martelly. Et comme on ne veut pas de Célestin, le rapport est bon ! Incontestablement, il s'agit d'une opération politique », a expliqué Mirlande H. Manigat, qui voit toutefois ces « interférences » comme des « broutilles » par rapport aux véritables atteintes à la souveraineté d'Haïti.
Ce serait excessif de dire que ce qui restait de la souveraineté nationale s'est envolée avec cet épisode électoral, a fait remarquer la constitutionnaliste. « Qu'un Etat ne soit pas capable de trouver 29 millions de dollars pour organiser des élections, c'est un manquement à la souveraineté. 29 millions, on n'a pas ça ? », a enchaîné Mme Manigat, qui promet de tout faire pour rétablir progressivement la souveraineté nationale passablement écornée.
Mirlande H. Manigat, expliquant qu'elle aurait pu se sentir offensée par une question sur des liens éventuels avec la pègre, a déclaré sans sourciller que « personne ne pourrait l'associer à la pègre ». Reconnaissant qu'Haïti n'échappe pas aux influences de cette pègre, du narcotrafic qui cherche des supports étatiques en Haïti comme ailleurs, la prof de droit constitutionnel a déploré le peu de procès de trafiquants de stupéfiants et la remise en liberté de Colombiens épinglés dans ces activités illicites.
« Si vous voulez, c'est l'illustration de la complicité avec des institutions de l'Etat », a-t-elle argumenté. « Il ne faut pas bâtir un roman noir sur cela. Il ne faut pas non plus nier l'existence de trafic de drogue », a-t-elle soutenu en revenant, au passage, sur l'idée qu'elle avait lancé bien avant Joseph Michel Martelly que la campagne électorale se déroule avec fair-play.
« Cette campagne peut être un modèle du genre », a-t-elle souhaité en pressant le CEP, à qui elle ne donne aucun chèque en blanc, à publier les chiffres, l'écart entre les candidats en lice pour le fauteuil présidentiel... alors qu'en fin soirée, d'autres hypothèses questionnent la validité des résultats définitifs du second sans la signature, paraît-il, de quatre conseillers électoraux sur huit... Suspense....
Roberson Alphonse
ralphonse@lenouvelliste.com
roberson_alphonse@yahoo.com
http://www.lenouvelliste.com/article.php?PubID=1&ArticleID=88745&PubDate=2011-02-04

Commentaire
La route est difficile, mais on avance. C'est déjà quelque chose. Surtout si l'on se défait définitivement de celui qui nous a souillés aux yeux de la communauté internationale. On pourra ainsi penser à autre chose. Il y a tant à faire.

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