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mardi 22 mars 2011

Dépouiller les urnes à la lueur des bougies

La machine électorale joue avec des allumettes lorsqu'elle livre des bougies à la place des torches électriques aux membres des bureaux de vote. Au marché du Canapé-Vert transformé en centre de vote, c'est à la lueur des bougies que les membres des vingt-trois BIV ont procédé au dépouillement des urnes.

Haïti: Port-au-Prince vient de vivre pour la première fois un second tour d'élections présidentielle et législatives. Les électeurs sont déjà rentrés chez eux. La nuit tombe lentement sur le marché du Canapé-Vert adossé au pied de l'ancienne résidence du président René Préval. Les employés des BV ont déjà entamé l'opération de décompte des bulletins de vote dans ce centre qui regroupe 23 bureaux. L'électricité fait des siennes. Elle vient et s'en va. Un électricien improvisé, de temps en temps, rétablit le contact de l'électricité.
Une bonne vingtaine de minutes plus tard, l'Electricité d'Etat d'Haïti reprend définitivement le courant. Observateurs, mandataires, force de l'ordre, journalistes sont aux aguets. Les gens ne sont pas des chauves-souris, ils voient difficilement la nuit. A la lueur des bougies, ils reprennent le décompte. Les membres des bureaux qui n'avaient pas reçu des torches électriques trouvent une belle occasion d'évoquer cette irrégularité du Conseil électoral. Dans le lot de matériel à délivrer aux centres de vote, il était aussi prévu des torches électriques.
Jouer avec des allumettes
Quelques bureaux qui avaient reçu ce matériel l'allument et reprennent l'exercice. Ceux qui en étaient dépourvus se remettent aux bougies. La machine électorale ne devrait pas jouer avec des allumettes. Un bulletin, ça s'enflamme ! pensent les plus réfléchis.
L'obscurité prête le flanc à tout prétexte. Un jeune mandataire demande à l'équipe d'un BV de recompter les voix. Plaintes, protestations. « Il est tard, nous devons rentrer chez nous », dit l'un d'eux. Au milieu de ce flot de contestations, un policier s'amène et dit tout de go : « Ma fout nou tout anba minòt ! », propos accueillis comme une douche froide.
« C'est son droit de protester, de demander un nouveau décompte », tempère un membre du BIV. Alors que tous les bureaux ont terminé l'exercice, ces jeunes reprennent le procesus, sous l'oeil amusé du mandataire.
Des journalistes de station de radio recueillent de BV en BV les résultats de vote de la journée et s'apprêtent à diffuser ces informations sur les ondes. Ils disent que la tendance de la journée s'est confirmée au marché du Canapé-Vert.
Dans ce centre de vote, les électeurs ont mis leur bulletin dans des urnes placées sur des tables destinées aux marchandises. Le vote, en grande partie, n'était pas confidentiel sur ces tables de marché. Les isoloirs de fortune ne dressaient pas de frontière dans l'espace délimité pour voter. Par-dessus le marché, les gens somnolaient, s'asseyaient sur ces tables ou discutaient avec le votant. Chacun pouvait voir le choix de l'autre dans ces bureaux de vote placés au coeur d'un marché !

Claude Bernard Sérant
serantclaudebernard@yahoo.fr
http://www.lenouvelliste.com/article.php?PubID=1&ArticleID=90441&PubDate=2011-03-21


Commentaire
Si la honte pouvait tuer, que de politiciens dans ce pays ouu la bougie tient lieu de torche, tomberaient foudroyés sous le coup de cette fournaise. C`est vrai qu`il y a des seuils, des degrés, au niveau de la honte comme en tout. Mais quel spécialiste nous aidera un jour, dans un siècle à venir, à déterminer le seuil de vergogne (ou de son absence) chez ces compatriotes nés dans l`obscurité, comme nous tous, mais qui choisissent volontairement de se condamner a y mourir car l`empressement de s`enrichir aux dépens de ceux qui n`ont rien les empêche d`apprendre. Ils brûlent les étapes. On pourrait leur demander de quel droit prétendez-vous devenir présidents sans avoir été citoyens? Mais ils ne comprendraient pas. Quel malheur!

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