Haïti: Le tremblement de terre du 12 janvier est en train de rapprocher la République d'Haïti et la Grande-Bretagne, croit l'ambassadeur de Sa Majesté la Reine d'Angleterre accrédité en Haïti.
L'ambassadeur Steven Fisher, qui a effectué une visite de courtoisie au Nouvelliste mardi, a profité de son passage pour faire un état des lieux de la coopération entre les deux pays dont les relations diplomatiques sont interrompues depuis 1966 au niveau des ambassadeurs après une brouille avec le régime de François Duvalier qui a débuté en 1962. Depuis, seule un consul honoraire représente les intérêts de l'Angleterre dans nos murs.
Tout change le 12 janvier 2010 avec le séisme. Dès le 13, l'ambassadeur Fisher qui a résidence en République Dominicaine, et qui vient de présenter ses lettres de créance en décembre 2009, est sur le terrain pour constater nos malheurs. Dans les mois qui suivent, il effectuera une dizaine de missions en Haïti, davantage, sans doute, que tous ses prédécesseurs en 40 ans.
Ce qui a changé, c'est aussi la perception d'Haïti par les Anglais. « Dans les semaines qui ont suivi le séisme, les dons des sujets de Sa Majesté ont afflué de façon considérable, et nos services gouvernementaux ont été submergés de demandes d'informations. Puis, à partir du mois d'avril, ce sont les entreprises britanniques qui ont commencé à s'intéresser à Haïti. Il y a encore aujourd'hui un très grand sentiment de solidarité avec Haïti dans tout le royaume. Haïti a cessé d'être le pays des tontons macoutes de Duvalier », estime Fisher.
Grande première dans les relations entre les deux pays, une mission d'aide humanitaire a débarqué et 20 millions de livres sterling ont été dépensés sur le terrain entre janvier et août de cette année quand la mission a pris fin.
Parallèlement, des firmes anglaises en architecture et en études routières ont pris pied ici. L'une travaille dans le cadre du projet financé par la Digicel pour reconstruire le Marché en Fer, landmark de la capitale, et l'autre entame une étude de la route Port-au-Prince—Saint-Marc financée par la BID.
Dans le même temps, une équipe de la coopération anglaise a travaillé sur la reformulation du code des prisons en Haïti et a contribué à la réhabilitation de deux établissements pénitenciaires : la prison juvénile de Port-au-Prince et celle de l'Arcahaie.
L'Angleterre finance aussi deux projets le long de la ligne frontalière entre les deux pays qui se partagent l'île d'Hispaniola. L'un à Thomonde, l'autre pour sensibiliser l'armée dominicaine au respect des droits humains dans ses rapports avec les Haïtiens qui traversent la frontière sans détenir tous les titres légaux.
L'ambassadeur Fisher n'est pas peu fier de ce qui s'est passé en si peu de temps après des années de léthargie dans les relations entre les deux pays et oeuvre à renforcer ce vent changement « petit mais important ».
« Une mission d'hommes d'affaires anglais viendra en mars 2011 en Haïti pour explorer, après les élections, les possibilités de faire des investissements et du commerce avec Haïti. Il y a une base d'intérêt et de sympathie pour Haïti que nos deux pays devraient exploiter au niveau économique et des échanges », estime l'ambassadeur.
Les plus importantes actions qui se passeront dans les prochains mois et qui marqueront le réchauffement des relations entre les deux pays concernent le symbolique.
Ce mercredi, Florence Boucard, le consul honoraire de la Grande Bretagne en Haïti, sera élevée par volonté de la Reine d'Angleterre à la dignité de Membre de l'Ordre de l'Empire Britannique.
L'Angleterre va offrir à Haïti un fac-similé authentifié de la Déclaration de l'Indépendance d'Haïti retrouvée récemment par une historienne canadienne dans les archives anglaises. La couronne britannique offrira aussi au pays des copies de lettres écrites par Toussaint Louverture, saisies sur un bateau français et entreposées depuis des siècles dans les archives de l'Angleterre.
« Il y a sans doute d'autres documents dans les archives de mon pays qui concernent Haïti ; il ne faut pas oublier que nous fûmes alliés contre les Français, et que c'est Jean-Jacques Dessalines lui-même qui a offert une copie de l'acte de l'Indépendance d'Haïti au représentant de la Reine.»
Le fait que l'Angleterre ait été un des occupants de Saint-Domingue est un peu passé à l'oubli ici où l'on ne se rappelle plus que du so british livre « Les Comédiens » de Graham Green et, plus près de nous, des exploits des équipes anglaises de football dont les amateurs de beau jeu se régalent à la télévision en direct chaque semaine.
Frantz Duval
duval@lenouvelliste.com
http://www.lenouvelliste.com/article.php?PubID=1&ArticleID=83594&PubDate=2010-09-14
Commentaire
Que ce début soit le vrai point de départ d'une relation plus fructueuse, plus solide et surtout plus favorable à la reconstruction dont Haïti a tant besoin aujourd'hui! Mais aussi dans l'intérêt des Britanniques qui trouveraient, nous le souhaitons, un environnement sain pour leur investissement.
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