Retour aux sources pour 162 Haïtiens
162 deux jeunes haïtiens prendront, mercredi matin, un avion officiel envoyé par le président sénégalais, Abdoulaye Wade, afin de se rendre au Sénégal. Comme un retour aux sources, ils vont y entreprendre des études universitaires grâce aux bourses d'études offertes par le gouvernement sénégalais en guise de support au pays, après le séisme du 12 janvier.
Haïti: Les yeux pétillants de joie, ils ont entre 19 et 25 ans et beaucoup d'entre eux ont terminé avec le cycle secondaire depuis quatre à cinq ans. Quelques-uns ont entamé des études universitaires, mais la majorité n'ont pas eu cette chance. Dans un pays miné par les malheurs et les crises en tous genres, ils en avaient l'envie, mais ils n'en avaient pas les moyens.
Lucienne a 24 ans et a bouclé ses études secondaires depuis deux ans. Caressant le rêve de devenir informaticienne, elle se demandait comment allait-elle parvenir à concrétiser son rêve. « Les études coûtent chères et mes moyens sont limités » explique-t-elle sans détour. Cette bourse d'études vient à point pour elle.
Mahotière, lui, a 22 ans et a passé son bac depuis 2008. Il souhaitait devenir avocat, mais les places à l'université d'Etat d'Haïti sont inaccessibles. Avec ses effets pervers, le séisme du 12 janvier est venu compliquer les choses. Après deux ans sur le pavée, les bourses sénégalaises vont lui permettre de concrétiser son rêve. « Je sais que ce ne sera pas facile de servir mon pays convenablement si je suis formé en Sciences Juridiques uniquement, ailleurs que sur le territoire de mon pays. Cependant je vais me spécialiser en droit international, comme ça je pourrai être utile à mon pays », avance-t-il avec empressement.
Elles sont deux amies et ont bouclé le cycle secondaire ensembles, en 2006. Après deux années sur le pavée, elles ont commencé leur formation à l'école hôtelière. Elles étaient en 2e année au moment du séisme du 12 janvier et depuis leur école n'a plus ouvert ses portes. Cette bourse sénégalaise va leur permettre au moins de recevoir une formation complète dans la discipline qu'elles ont choisie. « Nous ne regrettons pas les deux années que nous avons perdu. C'est vrai que nous accumulons du retard, cependant nous ne savons pas si l'école rouvrira ses portes. En plus, nous pensons que nous recevrons une meilleure formation dans le domaine », précisent-elles.
Agronomie, économie, médecine, sciences informatiques, sciences juridiques, génie mécanique : les ambitions sont variées, mais le champ des disciplines couvertes par les bourses sénégalaises sont toutes aussi variées. « Nous avons deux bourses en maîtrise touchant les sciences sociales et 160 couvrant presque toutes les disciplines en premier cycle universitaire y compris quelques formations professionnelles », indique le directeur général du Ministère des Sports, Daniel Pierre-Charles.
Sur la manière dont ces jeunes ont été recrutés, la directrice des Sports du ministère, Valliolah Julmus Saint-Louis reconnaît n'avoir pas eu cette responsabilité : « C'est une commission sénégalaise qui, travaillant en accord avec l'Université d'Etat d'Haïti, a assuré le recrutement. Le Ministère ne joue qu'un rôle de convoyeur, c'est-à-dire, il a pour mission de réunir les jeunes admis et de les acheminer au Sénégal ».
Ce que confirme le ministre des Sports, Evans Lescouflair : « C'est un avion officiel dépêché par le président sénégalais, Abdoulaye Wade, qui viendra chercher ces jeunes ».
Sur la manière dont Haïti pourra s'assurer de la sécurité, du logement et du traitement de ses ressortissants dans cette affaire, M. Lescouflair assure que, côté sénégalais, le président sénégalais a nommé M. Amin Bah comme ministre chargé des relations avec Haïti pour s'occuper de ces questions. Pour tout ce qui sera nécessaire, le gouvernement travaille à nommer un consul honoraire au Sénégal. En attendant, les jeunes pourront s'appuyer aussi sur le secours de l'ambassade d'Haïti qui se trouve à Paris », a-t-il ajouté avec satisfaction.
En ce qui a trait à leur quotidien et le suivi du programme, M. Lescouflair informe : « De temps à autre, les jeunes boursiers recevront la visite de différentes délégations haïtiennes dans le cadre de la Confejes ».
Au ranch de la Croix des Bouquets, la concrétisation de leur rêve a commencé depuis le vendredi 8 octobre. Pleins d'espoir, ils ont été accueillis par le Ministère des Sports qui dans le cadre de son rôle de formation civique, met en place des activités en vue de les mettre au pas sur le plan culturel et social. Attentifs, ils ont reçu un rappel sur la manière de se tenir à table, mais encore sur la manière de vivre en société et aussi sur l'art de rester digne du pays d'où ils proviennent. Dans la grande salle qui sert parfois de cafétéria lors des grandes occasions, une monitrice les fait écouter les différents rythmes de tambour qui constituent l'ossature de la culture haïtienne. Hilares, certains essaient aussi de danser en suivant le rythme comme le fait la monitrice. Essoufflé et souriant, le futur juriste, Mahotière ne cache plus sa joie : « Grâce au Ministère des sports, nous avons appris le ibo et le yanvalou . Maintenant, nous pourrons montrer quelques éléments de notre culture aux Sénégalais, au moment de nos échanges culturels avec eux »
A noter que l'avion qui devra emmener les boursiers au Sénégal se trouve à Port-au-Prince depuis le 10 octobre.
Enock Néré
nenock@yahoo.com
Commentaire
Le geste du président sénégalais est un signe indiscutable d'amitié et de solidarité envers un pays qui n'est pas étranger à la culture sénégalaise ou à celle de n'importe quel autre pays du continent noir. Ce geste est d'autant plus significatif que les pays qui se sont tournés vers Haïti pour l'aider à surmonter ses problèmes sont nombreux. Il est tellement facile de se dire, dans ces circonstances, « ce que je ne fais pas, un autre le fera ». C'est précisément ce qui, heureusement, n'est pas arrivé dans le cas d'Haïti. L'aide venait de partout et continue d’affluer de différentes façons et de partout. Le pays en a besoin et les familles qui souffrent ont cette possibilité de reprendre courage afin d'être mieux armées pour continuer à lutter et construire un avenir meilleur.
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