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vendredi 1 octobre 2010

Les USA s'engagent mais ne délivrent pas

Cible de critiques de sa lenteur à débloquer les fonds promis pour la reconstruction d'Haïti depuis le mois de mars 2010, l'administration Obama vient de nommer M. Thomas C. Adams comme coordonnateur spécial pour Haïti.
Haïti: « Près de neuf mois après le séisme dévastateur du 12 janvier, plus d'un million d'Haïtiens vivent toujours dans la rue au milieu des piles de déblais. Et à ce jour, pas un seul dollar sur les 1,15 milliard (845 millions d'euros) promis par les Etats-Unis pour l'aide à la reconstruction d'Haïti n'a été versé », ont écrit les journalistes Jonathan M. Katz et Martha Mendoza de l'Associated Press (AP) dans un article titré « Haïti attend toujours l'aide américaine promise pour sa reconstruction », publié par Miami Herald, dont la version française a été postée le 30 septembre 2010.
Cette somme avait été promise en mars dernier par la secrétaire d'Etat Hillary Clinton dans le but de financer cette année des projets de reconstruction. Mais à moins d'une semaine de la fin de l'exercice budgétaire 2010 aux États-Unis, l'argent est toujours bloqué à Washington. La cause : la bureaucratie et un manque d'organisation et de sentiment d'urgence, a constaté l'Associated Press, se basant sur des interviews avec des responsables du département d'Etat, de la commission sénatoriale aux relations extérieures ou encore de la Maison Blanche.
En attendant, Port-au-Prince, la capitale haïtienne dévastée, enregistre un nombre croissant de décès, et les rescapés continuent à souffrir dans des conditions de vie très dures. "Il y a vraiment des vies qui sont en jeu", a souligné John Simon, un ex-ambassadeur américain auprès de l'Union africaine - aujourd'hui membre du Centre pour le développement mondial, un cercle de réflexion de Washington -, cité dans l'article.
« L'aide américaine est d'autant plus importante qu'Haïti n'a pas reçu beaucoup d'argent des autres donateurs internationaux. Sur les 8,75 milliards de dollars (6,43 milliards d'euros) promis pour la reconstruction par une cinquantaine d'autres pays et organisations, seulement 686 millions de dollars (504 millions d'euros) ont effectivement été versés jusqu'ici, soit moins de 15% du total », a rapporté l'AP.
Le manque d'argent a failli interrompre les travaux menés sur le terrain par CHF International, agence américaine chargée de déblayer les lieux encombrés et construire des abris temporaires. Seulement 2% de gravats ont été retirés et 13 000 abris temporaires construits, soit moins de 10% du nombre prévu. Cette agence basée dans le Maryland demande au gouvernement américain de fournir 16,5 millions de dollars en vue d'enlever plus de 21 millions de (pieds cubes) de décombres et construire 4000 maisons temporaires en bois et en métal.
« Un simple coup de téléphone et les camions seront de nouveau dehors, sur le terrain. Nous avons des contractuels prêts à continuer le déblayage. Nous avons des fournisseurs locaux et internationaux prêts à transporter le bois et les autres matériaux dont nous avons besoin », a confié à l'AP le directeur national de CHF, Alberto Wilde. « C'est juste une affaire d'argent », a-t-il ajouté.

On s'emmêle les pinceaux

A Washington, il y a confusion au sujet de l'argent. Au cours d'une audition en juillet dernier, le directeur de l'USAID, Ravij Shah, avait remercié les membres du Congrès d'avoir approuvé les fonds. « Les ressources suivent et sont en train d'être dépensées dans le pays », avait dit le responsable dont les propos sont cités par l'AP.
Les propos de Ravij Shah n'étaient pas exacts, pas véridiques, et depuis rien ne s'est passé dans le sens du déblocage de ces fonds, font remarquer les journalistes Jonathan M. Katz et Martha Mendoza.
Lorsque le tremblement de terre s'est produit, les Etats-Unis avaient envoyé des militaires, des sauveteurs, des travailleurs et des matériels dans la capitale dévastée. Le 24 mars 2010, le président Barack Obama avait sollicité du Congrès 2,8 milliards d'aide d'urgence pour Haïti, dont environ la moitié pour rembourser l'argent dépensé par l'USAID, le ministère de la défense et d'autres agences engagées sur le terrain. Et une dette additionnelle de 212 millions. L'essence de cette requête était de 1 milliard 15 millions de dollars pour la reconstruction.
Une semaine après, l'ex-président américain, devant les représentants de 50 pays à l'ONU et aux côtés du président René Préval, avait prévenu que si l'effort de reconstruction d'Haïti stagnait, était lent, inefficace, s'il était conflictuel, sans transparence, sans coordination, comme c'était le cas auparavant, cela pouvait avoir des conséquence sur la région, ont écrit les journalistes.
C'était il y a six mois. En mai, le Sénat avait approuvé une requête de fonds pour Haïti, et le Congrès a attendu jusqu'au mois de juillet pour faire pareil. Ces votes ont rendu disponibles 917 millions de dollars, mais sans spécifier comment et quand dépenser cette somme. Sans cette étape finale sur les modalités d'utilisation, cet argent restera dans les caisses du Trésor américain, selon l'article.
Six mois après, le texte de loi qui doit autoriser la distribution de cette aide est bloqué au Congrès par le sénateur républicain de l'Oklahoma, Tom Coburn, a découvert l'AP. "Il bloque le texte parce que celui-ci prévoit inutilement un important coordinateur pour Haïti", a expliqué la porte-parole de l'élu, Becky Bernhardt.
Le projet propose effectivement la désignation d'un nouveau coordinateur chargé d'élaborer une stratégie de reconstruction en partenariat avec l'Agence américaine pour le Développement (USAID). La création du poste coûterait cinq millions de dollars (3,6 millions d'euros) sur cinq ans, en incluant les salaires et les frais d'une équipe de sept personnes.
Faute d'approbation du texte, le département d'Etat tente de débloquer des fonds en contournant autant que possible le Congrès. Il a envoyé aux parlementaires un "plan de dépenses" le 20 septembre et a donné aux élus 15 jours pour l'examiner. S'ils ne le font pas, l'argent pourra être débloqué malgré tout pour des projets qui auront été approuvés.
"Nous devons nous assurer que les besoins des Haïtiens ne sont pas sacrifiés à cause d'obstacles procéduraux et bureaucratiques", a déclaré à l'AP le président de la commission sénatoriale aux relations extérieures, John Kerry. Presque neuf mois après le séisme, "des retards supplémentaires (...) ne sont pas acceptables", ajoute-t-il.
Interrogé par l'Associated Press sur la disponibilité de cet argent, un porte-parole du département d'Etat américain a confié que l'on espère commencer les dépenses dans les semaines et les mois à venir. Il a ajouté, selon l'AP, que 275 millions de dollars avaient été décaissés en mars dernier et ont permis de financer des projets dans les domaines de l'agriculture, de l'emploi, de la santé et de la construction d'abris mais pas dans la reconstruction à long terme.

Assez, c'est assez

A ce stade, on devrait être dans la phase de construction d'abris semi-permanents. Où sont ces abris ? Nous ne les avons pas encore vus. Il n'y a pas assez d'argent utilisé, il n'y a pas eu beaucoup de travail effectué, a indiqué le responsable du Centre oeucuménique des droits de l'homme, Jean-Claude Bajeux, interrogé par l'AP. Bien sûr, il n'y a pas de garantie que l'argent pourrait conduire au succès de la reconstruction, a expliqué M. Bajeux en référence à l'échec de précédentes initiatives américaines.
Je ne crois pas que l'argent fera une quelconque différence, selon Pierre Espérance, un autre militant des droits humains cité par AP. Le peuple haïtien n'est pas vraiment impliqué dans le processus, a-t-il expliqué.
Cependant, des officiels s'accordent à dire que ces fonds peuvent servir à payer pour de nouvelles approches capables de rendre Haïti plus viable et aider les projets de reconstruction qui auront un impact bénéfique sur la vie de millions d'Haïtiens.

Découverte de l'AP

L'article a révélé que l'AP a découvert que 874 millions des fonds promis par d'autres pays lors de la conférence des donateurs étaient de l'argent déjà promis pour aider Haïti bien avant le tremblement de terre. 1 milliard 13 millions de dollars additionnels n'allait jamais être envoyé ; c'était dans la rubrique de l'effacement de la dette externe du pays. Et 184 millions étaient des prêts au gouvernement haïtien et non de l'aide, selon ce papier.
Le bureau de l'envoyé spécial des Nations unies Bill Clinton, qui fait jusqu'ici le monitoring, le travail de traçabilité des fonds délivrés, ne savait pas qui avait cet argent. L'envoyé spécial lui-même a dit à l'AP en juillet et encore en août derniers qu'il mettait de la pression pour que les donateurs honorent leurs promesses.

Les promesses de Hillary R. Clinton

« Les dirigeants d'Haïti doivent prendre la responsabilité de la reconstruction de leur pays », avait noté la Secrétaire d'État des États-Unis Hillary Clinton, dont les propos ont été largement cités dans la presse, après avoir confirmé l'engagement des Etats-Unis à contribuer à hauteur de 1,15 milliard de dollars pour la reconstruction à long terme d'Haïti. « Et nous devons aussi, nous, les membres de la communauté internationale, avait ajouté Mme Clinton, faire les choses différemment. Il sera tentant de revenir aux vieilles habitudes, de travailler en évitant le gouvernement au lieu de l'associer aux efforts en tant que partenaire, ou de financer une multitude de projets bien intentionnés mais éparpillés au lieu de faire les investissements plus profonds et à long terme dont Haïti a besoin à présent. »

Les promesses de Barack Obama

Les États-Unis d'Amérique continueront à être un partenaire sûr dans l'effort de reconstruction d'Haïti, avait réaffirmé le président américain Barack Obama lors d'une conférence de presse conjointe avec son homologue haïtien René Préval à la roseraie de la Maison Blanche, le mercredi 10 mars 2010.
« C'est un engagement que j'ai pris au début de la crise, et j'entends, au nom des États-Unis Amérique, le respecter », avait assuré Obama devant un parterre composé de membres du Congrès, de travailleurs humanitaires, de fonctionnaires de l'USAID, du FEMA, du service des transports, de la sécurité intérieure, du Département d'Etat... et d'Haïtiano-Américains.
« Aucune nation ne pourrait répondre seule à une catastrophe de cette ampleur sans un large support de la communauté internationale », avait ajouté le président Obama, dont l'administration se préparait alors à demander au Congrès une aide d'urgence de trois milliards de dollars en faveur d'Haïti. Beaucoup d'Haïtiens, avait-il poursuivi, vivent dans la précarité et ont désespérément besoin, dans certains cas, d'abris, de nourriture et de médicaments alors que s'approche l'été, généralement pluvieux.
Maintenant, le défi, avait-il fait remarquer, est de prévenir une seconde catastrophe. La situation reste difficile sur le terrain, et personne ne doit se faire d'illusion, avait-il dit.
Selon Obama, Haïti peut et va montrer la voie, avec une vision forte, de son futur. La communauté internationale peut apporter les ressources nécessaires à la coordination d'un effort soutenu. En travaillant ensemble, avait expliqué le président des États-Unis, on peut s'assurer que cette assistance ne soit pas simplement délivrée sous forme d'aide d'urgence à court terme. Il faut aider Haïti à renforcer ses propres capacités en vue de fournir les services de base aux Haïtiens.
Tandis que les critiques fusent, l'administration Obama vient de nommer un coordonnateur spécial pour Haïti.
Entre-temps, alors que certains égrènent leurs chapelets dans l'attente des milliards promis, vendredi dernier, la météo a démontré l'extrême vulnérabilité de milliers de sinistrés qui vivent dans les cités des tentes.
M.Thomas C. Adams a plus de 35 ans d'expérience. Il a été coordonnateur des assistances des Etats-Unis en Europe et en Asie entre 2005 et 2008. Il était responsable de la conception et de la réalisation de tous les programmes d'assistance d'urgence des États-Unis d'Amérique pour 29 anciens États communistes d'Europe et d'Asie. A ce poste, M. Adams a supervisé un staff de 35 personnes et contrôlé annuellement l'allocation d'environ 800 millions de dollars us d'assistance et 1.5 milliard de dollars d'assistance à d'autres agences américaines qui aidaient des pays à faire la transition vers la démocratie et l'économie de marché.
M. Adams est un gradué de l'Université de Virginia et est détenteur d'un baccalauréat en histoire de l'art. Il parle le français, le Swahili, le hongrois. M. Adams a reçu la décoration du mérite et deux hautes distinctions pour sa carrière.

Roberson Alphonse

http://www.lenouvelliste.com/article.php?PubID=1&ArticleID=84140&PubDate=2010-09-30

Commentaire
Le problème n'est pas si différent de tous ceux auxquels on nous a habitués jusqu'à présent. Il s'agit d'un comportement typique des gouvernements amis et des organismes internationaux en général, quand ils traitent avec Haïti. Ils savent qu'il n'y a rien de fiable, rien de solide sur le terrain en termes de partenaires. Le gouvernement est inexistant, les autres institutions sont faibles-les dictatures des Duvalier en sont venus à bout- et les parlementaires haïtiens, comme beaucoup de ministres ne font que "guetter leur part". Toute négociation sérieuse pour faire quelque chose en Haïti, et il faut être bien au fait de cette mentalité des dirigeants, va se heurter à la résistance des traditionnalistes (Entendez des "profiteurs traditionnels") si leur profit n’est pas évident. Autrement, ne comptez pas sur leur détermination ! Or les Américains, pas plus que les Français, les Canadiens ou les autres, n'en sont pas dupes. Qui mieux que les Américains et les autres responsables des pays mentionnés pourrait être informés à temps de la trajectoire de l'argent détourné par nos fonctionnaires corrompus. Bref, si les gouvernements et organismes mentionnés savent comment rouler les petits pays tout en donnant l'impression de faire quelque chose, ils ont de solides relais sur le terrain dans un pays comme Haïti. Prenons le cas d'un autre pays: La Jamaïque ou la République Dominicaine. Dans le cas de la Jamaïque, petit pays, mais dont les dirigeants savent se faire respecter, ce genre de situation est impensable. Dans le cas de la République Dominicaine, un exemple concret. Les Etats-Unis proposent une aide non demandée à ce pays (100.000.000 de dollars si ma mémoire est bonne) et le gouvernement américain envoie l'aide sous forme de grains (de maïs) dont la République Dominicaine n'avait pas besoin. Le pays a catégoriquement refusé. Problème résolu! Qui sont les dirigeants haïtiens, où est leur prestige pour oser aller si loin? Ils doivent donc tout accepter y compris de servir de boucs émissaires après avoir fait du peuple leur bouc émissaire...pour s'enrichir et paraitre malheureux! Le seul art dans lequel ils puissent se dire maitres, de vrais maitres. Le pays n’en peut plus, il a vraiment besoin d'un changement!

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